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De quelques points de repère en matière de législation sur les armes

Introduction.

Comment ne pas penser à Dantes et au frontispice des portes des Enfers, lorsque l’on tente de synthétiser le dernier état de la question relatif à la législation sur les armes ? Comment ne pas se souvenir de la leçon de Lao Tseu considérant que l’essence même de la Loi est de faire régner l’ordre et l’harmonie au sein du Peuple ?

Si le lecteur à la curiosité d’introduire une recherche informatique relative aux législations en matière d’armes depuis la loi de 1933, et s’il lui prend la curiosité de ne taper aucune autre précision que le mot « arme », il constatera que depuis l’avènement de la loi de 1933, pas moins de 1030 textes ont été publiés au Moniteur belge.

L’on se souviendra que la loi du 08 juin 2006, prise dans l’urgence, et la nécessité d’une réponse politique ensuite du double meurtre raciste d’Anvers, publiée le 09 juin 2006 dans la même urgence, avait entraîné un ensemble de remarques quant à son inapplicabilité et ses incohérences, au point que la Cour Constitutionnelle, saisie de 7 recours différents, avait prononcé en audience publique du 19 décembre 2007 , un arrêt comportant 126 pages annulant différentes dispositions et appelant manifestement à en modifier d’autres. Cet arrêt avait été publié par extrait au Moniteur  en page 3612, le 23 janvier 2008, permettant ainsi à une loi du 23 novembre 2007 d’être publiée, le 31 décembre 2007, afin de proroger certains délais prévus dans la loi du 08 juin 2006 pour permettre au Législateur de tenir compte de la décision de la Cour Constitutionnelle.

Depuis cet arrêt, le Législateur a publié différents textes et particulièrement une loi du 25 juillet 2008 publiée au Moniteur belge, le 22 août 2008. Dès le jour de sa publication au Moniteur belge, soit le 09 juin 2006, la loi du 08 juin 2006 réglant des activités économiques et individuelles avec des armes entra partiellement en vigueur. Loi complexe et compliquée qui mélange des concepts parfois contradictoires, elle se voulait révolutionnaire et clarificatrice. Depuis, modifiée par la loi du 25 juillet 2008, elle a connu plus de trente-six textes complémentaires dont une circulaire « explicative » de plus de 150 pages datée 29 octobre 2010 et publiée le 24 novembre 2010 qui fait toujours l’objet d’un recours pendant au Conseil d’Etat, et une nouvelle circulaire explicative datée cette du 25 octobre 2011 publiée ce 02 décembre 2011 en 2ème édition du Moniteur belge de la page 71202 à la page 71300. Cette dernière circulaire reprend l’interprétation actuelle du Ministère de la Justice, interprétation qui ne fait pas l’unanimité. Il se relève que cette 2ème circulaire explicative et interprétative, s’imposant à l’administration, semble-t-il, est publiée le jour même, où le Premier Ministre d’un gouvernement en affaires courantes quitte ses fonctions et prend congé du Parlement.

Pour la clarté de l’exposé, il parait opportun de commencer par la législation, telle que modifiée en 2008.

Loi du 25 juillet 2008 modifiant la loi du 08 juin 2006.

Le 22 août 2008, en page 44.142, est publiée la loi du 25 juillet 2008 modifiant la loi du 08 juin 2006 réglant des activités économiques et individuelles avec des armes.

Cette loi comporte 35 articles modifiant à peu près l’ensemble des 58 articles antérieurs de la loi de 2006.
L’article 2 de la loi du 08 juin 2006 comportait 21 définitions ; la loi du 25 juillet 2008 ajoute 5 définitions relatives à la notion de résidence, à la définition de pièces d’arme, telles que canon, revolver et pistolet, ainsi qu’une définition de la notion d’arme à répétition.

Le lecteur sera attentif à la notion de résidence qui aura une implication tout à fait extraordinaire dans la loi relative à la chasse, ainsi que des conséquences quant au port et au transport d’armes de chasse dans le cadre de l’activité de chasse.

J’y reviendrai ultérieurement.

Dans le cadre de la classification des armes, la nouvelle disposition interdit maintenant les lunettes de visée nocturnes (art. 3.15, 4ème petit tiret).

L’on se souviendra qu’antérieurement, il existait une controverse quant à l’interdiction des lunettes de visée nocturne, si celles-ci étaient, soit à infrarouge, soit à procédé d’intensification de lumière. Cette controverse est maintenant terminée, puisque l’ensemble de l’appareillage optique utilisable de nuit est catalogué dans les armes prohibées.

Le même article comporte une autre modification relative aux droits accordés par la loi au Ministre de la Justice et au Ministre de l’Intérieur de prohiber des armes dangereuses pour la sécurité publique, ainsi que leurs munitions.

L’ancien texte parlait d’armes ou de munitions « qui peuvent constituer un grave danger ». Le nouveau texte parle de « danger grave et nouveau… ». Faut-il voir dans la condition de « nouveauté », le souci de répondre à une évolution technologique, ou la nouveauté résultera t’elle d’un événement et d’un usage « nouveau » d’un objet préexistant ???

A cet égard, le Conseil d’Etat, par arrêt du 10 février 2011 sous le numéro 211.147, a annulé l’arrêté ministériel du 11 mars 2010 classant parmi les armes prohibées certains accessoires d’armes à feu. Un des considérant retenu par le Conseil d’Etat a été l’absence « d’urgence ».

Au même article, le paragraphe 3 en son point 2, impose comme condition au classement d’armes soumises à autorisation qui ne serait pas des armes à feu, la condition préalable de recueillir l’avis du conseil consultatif, tel qu’instauré par l’article 37 de la loi du 8 juin 2006.

La composition et le mode de délibération de ce conseil consultatif, créé par l’article 37 de la loi du 08 juin 2006, a fait l’objet d’un arrêté royal du 25 janvier 2007 modifié par l’arrêté royal du 27 mai 2008 publié au Moniteur, le 29 Mai 2008.

Ce Conseil, à ma connaissance, ne s’est jamais réuni utilement à ce jour et n’a produit aucun avis.

L’article 4 de la loi du 08 juin 2006 dispose que toutes les armes à feu fabriquées en Belgique ou importées devaient nécessairement être inscrites dans un registre central des armes dans lequel, aux vœux de la loi, « un numéro d’identification unique leur est attribué ». On se souviendra que le Registre Central des armes (le RCA) a été créé par l’arrêté royal du 20 septembre 1991, en son article 28.

La loi du 08 juin 2006 prévoyait que la date de l’entrée en vigueur de l’article 4 serait fixée par le Roi par arrêté délibéré au conseil des Ministres. La loi du 25 juillet 2008 prévoit cette fois que cet article entrera en vigueur le 01er janvier 2010.

Cette disposition pose différents problèmes : qu’en sera-t-il des armes qualifiées comme telles qui ne comportent pas de numéro ? Qui sera chargé de frapper ce nouveau numéro ? Qu’en est-il encore des armes qui comportent déjà un numéro ; celui-ci sera-t-il enregistré comme tel ou un nouveau sera « sur-frappé » sur l’arme ?

L’article 5 de la loi du 08 juin 2006 connaît plusieurs modifications à considérer. Cet article traite en effet des conséquences de condamnations pénales quant à la recevabilité des demandes formulées par le condamné. L’on retiendra principalement que cet article est entré en vigueur le 1er septembre 2008. L’on retiendra également la modification portée au § 4, 2.b relative aux irrecevabilités quant aux condamnations antérieures dans le cadre de demandes introduites au titre de collectionneur ou de détenteur légal d’armes.

Ainsi, les articles 214, 274, 344,345 et 415 du Code Pénal ont été retirés, tandis qu’ont été rajoutés les articles 136 bis à 140, 226, 246 à 249, 331 bis, 372 à 377, 417 ter à 417 quinquies, 442 ter, 488 bis, 491 à 505, ainsi que 528 à 532 bis et 538 à 541.

Les condamnations prononcées du chef de ces nouveaux articles, tels que repris, empêchent, dès lors, de considérer les demandes comme recevables.

La question est de savoir ce qu’il en advient des demandes introduites sous l’empire de la loi du 08 juin 2006, avant la publication de la loi du 25 juillet 2008, auquel il n’a pas encore été fait droit, de même que le sort de la situation de ceux qui, par hypothèse, auraient obtenu les autorisations nécessaires, mais seraient visés par les  dispositions de la loi nouvelle.

Le même article comporte encore des modifications aux paragraphes 4, point h et i, relatives aux condamnations prononcées, ensuite d’infractions à la loi du 10 avril 1990 réglant la sécurité privée et particulière, ainsi qu’à la loi du 19 juillet 1991 organisant la profession de détective privé.

Un point k est ajouté dans la nouvelle disposition, en ce que les condamnations prononcées du chef des législations régionales ou communautaires relatives à la chasse et au tir sportif interdisent maintenant de présenter une demande au sens de l’article 5.

Enfin, qu’en sera-t-il de l’effet d’une éventuelle amnistie ou d’une grâce ? Qu’aura comme conséquence, une requête en réhabilitation ? Devra-t-on tenir compte du certificat de bonne vie et mœurs ou du casier judiciaire ? Quid des conséquences de l’application de la loi de défense sociale ???

Il semble à ce jour que l’administration admette l’effet d’effacement d’une procédure aboutie en  réhabilitation.

L’article 6 de la loi du 08 juin 2006 prévoyait un mécanisme d’autorisation pour tenue de musée ou de collection privée, lorsque le nombre d’armes est égal ou supérieur à 10. La nouvelle législation ramène ce chiffre à 5 armes à feu soumises à autorisation. Ces chiffres « 10 » et « 5 » font écho à l’ancienne législation relative au dépôt d’armes chez un particulier aux conditions déterminées par l’arrêté royal du 24 avril 1997 publié au Moniteur, le 16 Mai 1997.

Rappelons que cet article 6, tel que prévu par la loi du 08 juin 2006, entrait en vigueur le 09 janvier 2007, alors que la nouvelle limitation à 5 armes à feu entre en vigueur à partir du 01er septembre 2008.

Là encore, la question du régime transitoire n’a pas été rencontrée par la nouvelle législation.
L’article 7 relatif aux agréments qui devaient s’appliquer de par l’ancienne législation à la date du 09 janvier 2007, pour autant que les dispositions étaient nécessaires en application de l’article 6, est quant à lui entré en vigueur le 01er septembre 2008.

L’article 8 relatif aux opérations avec des armes prohibées, tel que publié par la loi du 08 juin 2006, avait déjà été complété et modifié par la loi du 20 mars 2007 publiée au Moniteur belge, le 26 avril 2007. Cet article est entré en application, le 01er septembre 2008.

L’article 11 de la Loi du 08 juin 2006 vise particulièrement le régime et les conditions de détention d’une arme à feu par un particulier.

L’on se souviendra que l’arrêt de la Cour Constitutionnelle dans son dispositif annulait « dans la loi du 08 juin 2006 réglant des activités économiques et individuelles avec des armes :
l’art. 11, § 3, point 9, en ce qu’il ne mentionne pas comme motif légitime la conservation d’une arme dans un patrimoine, lorsque la demande d’autorisation de détention concerne une arme soumise à autorisation à l’exclusion des munitions, pour laquelle une autorisation de détention a été délivrée, ou pour laquelle une autorisation de détention n’était pas requise (…) ».

Le Législateur de ce 25 juillet 2008 tire une partie des conséquences de cet arrêt, et apporte plusieurs modifications à l’ancien article 11 de la loi du 08 juin 2006.

Ainsi, on retiendra qu’est maintenant considéré comme motif légitime d’acquisition et de détention d’une arme l’exercice, non plus d’une profession présentant des risques particuliers, mais bien d’une activité présentant des risques particuliers ou nécessitant la détention d’une arme à feu ( article 11, point 9, c). La notion « d’activité » me semble plus large que le critère purement professionnel, mais on pourrait tout autant considérer que seule une ou plusieurs « activité(s) » particulière(s) de l’exercice d’une profession pourrai(en)t former la condition, en manière telle que la condition contingenterait l’autorisation à l’activité uniquement. Sur les conditions d’acquisition, de port, de détention d’armes par les professionnels, on s’en réfèrera notamment à la circulaire GPI 62 du 14 février 2008 relative à l’armement de la police intégrée, structurée à deux niveaux, publié le 29 février 2008 en page 12615 du Moniteur, et l’arrêté royal du 09 octobre 2008, publié le 22 octobre 2008 relatif aux armes utilisées par les entreprises, organismes et personnes visées par la loi du 10 avril 1990 réglementant la sécurité privée et particulière.

Le point f de ce point 9 comportait comme motif légitime la participation à des activités historiques, folkloriques, culturelles ou scientifiques. On se souviendra du véritable tollé qu’avait entraîné la lecture de l’article 43 de la Loi du 08 juin 2006 modifiant l’article 1 bis de la Loi du 29 juillet 1934 relatif à l’interdiction des milices privées. Curieusement, cet article 43 n’est pas modifié par la Loi du 25 juillet 2008.

La nouvelle législation renvoi cependant aux conditions de recevabilité, telles qu’exigées dans les points 1 à 4, 6 et 8 de l’article 11, ce qui semble avoir été oublié dans le cadre de la loi du 08 juin 2006.

L’on retiendra encore, en même disposition, les assouplissements autorisés aux titulaires du permis de chasse, tels que prévus au point 4 du paragraphe 4 du même article, ainsi que la suppression de l’examen médical obligatoire au bénéfice de certains tireurs. Non seulement, on évite le double examen (une fois par an pour la licence et une fois pour l’autorisation), mais on répond ainsi à l’Ordre des Médecins qui s’était insurgé sur le transfert de responsabilité puisqu’il leur était quasiment demandé de garantir que le demandeur ne présentait aucun risque d’ordre psychologique, notamment… L’Ordre avait d’ailleurs répondu à cet exigence en recommandant d’inscrire sur le certificat ad hoc « A ce jour et pour l’instant ». Sur l’intervention des médecins, on lira l’arrêté ministériel du 16 octobre 2008, publié au Moniteur le 20 octobre 2008 ». Portant reconnaissance des médecins compétents pour la délivrance d’une attestation visée à l’article 14, soit les conditions de port d’arme, de la loi sur les armes », dont la traduction en langue allemande a été publiée au Moniteur, le 12 novembre 2008.

La nouvelle loi introduit un article 11/1 qui répond à tout le moins partiellement à l’arrêt de la Cour Constitutionnelle, en ce que cette nouvelle disposition permet maintenant à toute personne de conserver au titre de valeur patrimoniale, une arme, à condition toutefois que cette arme ne nécessitait pas d’autorisation avant l’entrée en vigueur de la loi du 25 juillet 2008, d’une part et d’autre part, en considérant l’exclusion à l’accès aux munitions.

L’article 11.2 nouveau, également, vise le cas particulier de l’héritier (§ 2), ainsi que du tireur sportif ou du chasseur qui perdrait cette qualité (§ 3).

L’article 12 fait exception aux conditions de l’article 11 nouveau, et vise particulièrement les armes de chasse.

Le point 1 est modifié, en ce que ce ne sont plus « des armes à feu longues conçues pour la chasse, ainsi que les munitions y afférentes… », mais bien « des armes longues, autorisées à cette fin-là, où le permis de chasse est valable, ainsi que les munitions y afférentes ».

Cet article posera un énorme problème au chasseur belge qui devra articuler les législations décrétales, région par région, et la nouvelle disposition, puisque le droit de la chasse et les armes autorisées pour pratiquer celle-ci relèvent de la compétence des Régions.

En ce sens, on retiendra l’arrêté du Gouvernement Flamand modifiant certaines réglementations relatives à la chasse du 04 juillet 2008, publié le 29 août 2008 en page 45.254 du Moniteur belge qui, en son article 7, 2, visait l’usage d’un fusil de calibre de 22 pouces, soit 55,88 mm de diamètre. Cette erreur avait été corrigée par l’arrêté du même Gouvernement Flamand du 05 septembre 2008, cette fois publié en page 46.533 du Moniteur belge.

Cette erreur corrigée montre à suffisance que les discordances de « législations » entre Régions peuvent amener le fait qu’une arme en Belgique, soit de chasse ou pas, et dès lors, visée par l’article 12 nouveau dans un sens ou dans l’autre, en fonction de la Région où l’on postule son achat, ou bien encore où l’on réside. Que se passe-t-il encore, en ce qui concerne le transport et le motif légitime qui pourrait être admis dans une Région et pas l’autre ?

Qu’en est-il d’armes de chasse interdites en Belgique et obligatoires en Afrique ou en Asie dans les safaris ? Sont-elles encore des « armes de chasse » ???

Qu’en est-il du transport d’une arme qualifiée de « chasse » en Région Wallonne,  de Bruxelles à Arlon en passant par la Région flamande ?

L’article 12 nouveau comporte encore en son point 5 une réponse positive à une demande formulée par le milieu des collectionneurs, en ce que les particuliers majeurs qui manipulent « au maximum une fois par an » une arme soumise à autorisation sur un champ de tir reconnu, font exception à l’article 11 et à ses conditions. Toute la question évidement repose quant au contrôle de la condition de fréquence. Il est par ailleurs à noter que ce « collectionneur » n’est pas autorisé à acheter les cartouches pour ce « tir d’entretien », puisque la Loi ne l’autorise pas à acheter lesdites munitions !

La nouvelle loi introduit encore un article 12/1 autorisant le prêt d’arme à feu, selon un ensemble de conditions énumérées entre titulaires de permis de chasse ou de licence de tireur sportif, voir d’une autorisation de détention d’armes à feu plus générale.

On retiendra à cet égard particulièrement la condition du point 4 du nouvel article qui exige un accord écrit et signé par le prêteur, ainsi qu’en annexe une copie du document attestant de l’existence du permis de chasse ou de la licence de tireur ou de la détention sauf, dit la loi, si le prêteur est présent. La notion de « présence », s’entend-elle par « à côté » ou dans le même lieu ???

L’article 13 connaît différentes modifications, en ce qu’il précise notamment donner nouveau pouvoir au Ministre de la Justice d’agir concomitamment au Gouverneur de la Province compétent pour la résidence de la personne visée.

15 accordait anciennement une présomption de permis de port d’arme liée à l’existence d’un motif légitime pour les personnes visées par l’article 12, ancienne formule.

Cet article est réécrit et accorde toujours une autorisation de port d’armes, mais uniquement dans le cadre de la pratique de l’activité, soit de chasse, soit de tir aux personnes visées au nouvel article 11, § 3 et au nouvel article 12.

La condition de motif légitime est évidemment maintenue.

L’article 19 de la loi du 08 juin 2006 visait les interdictions, et connaît, lui aussi, différentes modifications.

Ainsi, l’interdiction de vente des armes par Internet aux particuliers est évidemment maintenue, mais il est expressément précisé que cette interdiction est également d’application à toutes les ventes entre particuliers par correspondance, et qu’il est également interdit d’organiser des ventes à distance dans le même contexte.

Une autre modification tout à fait fondamentale est apportée par la loi du 25 juillet 2008 dans le point 5 de ce nouvel article 19, en ce que la dernière partie de l’interdiction se voit amputée de par la loi du 25 juillet 2008 de l’interdiction de vente des armes en bourse aux armes.

En effet, les derniers mots de cet alinéa, soit « par des armuriers et des collectionneurs agréés » ont été supprimés, en manière telle qu’à nouveau les particuliers retrouvent l’autorisation de vendre en bourse aux armes.

Il est à noter que de par les nouvelles dispositions de la loi du 08 juin 2006, les bourses aux armes sont soumises à l’autorisation préalable du Ministère de la Justice.

Les ventes en bourse aux armes ne sont évidemment pas exclusives du respect de l’ensemble de la Législation et, notamment, des conditions d’acquisition des armes.

On notera que par principe, les armes de panoplie sont en vente libre, ce qui malheureusement risque de ne pas perdurer longtemps, puisqu’il existe des projets de réforme des textes à cet égard avec, notamment, pour objectif de soumettre les armes de panoplie au mécanisme de la déclaration, tel qu’on le connaissait antérieurement de par les dispositions de la loi de 1933, telles que modifiées par la loi de 1991.

Ainsi, à suivre cette idée : toutes les armes, en ce compris les armes de panoplie, seraient dans un futur proche contrôlable et, donc, soumises au registre central des armes.

Lorsque l’on combine cette idée de nouvelle législation avec l’article 4, tel qu’il sera appliqué en 2010, l’on perçoit nettement la volonté du Législateur d’opérer un contrôle global et total sur tout ce qui pourrait être qualifié d’arme en Belgique.

L’article 21 vise les conditions du transport des armes à feu ; il connaît une modification en son point 1, 2, en ce que la nouvelle législation autorise maintenant expressément le transport d’armes de panoplie, ce qui antérieurement allait de soi, puisqu’il s’agissait d’armes d’acquisition, de détention et de vente libre… Pourquoi, dès lors, cette disposition, si ce n’est par l’existence d’une bien vilaine arrière-pensée ?

Cet article 21 pose un autre problème aux chasseurs.

En effet, à lire le texte, seul le transport entre le lieu de détention de l’arme et le lieu d’exercice de l’activité, que ce soit de la chasse ou du tir, est autorisé à l’exception du motif légitime de se rendre chez un armurier.

Or, cela suppose nécessairement que le chasseur transporte son arme en temps continu de son lieu de domicile au lieu de chasse et retour. Cela suppose par exemple, qu’il ne prenne pas une nuit d’hôtel ou rende visite à une tierce personne, alors qu’il transporte ses armes en vue d’une partie de chasse.

Faut-il aller jusqu’au bout de l’expression de l’article, et considérer que le chasseur qui transporterait ses armes n’est pas autorisé à faire le plein de son véhicule ???

Faut-il considérer que le tireur, après une éventuelle compétition, n’est pas autorisé à garder les armes dans son coffre et à aller au restaurant ???

A suivre strictement la loi, les réponses semblent être malheureusement positives. Sans doute verra t’on apparaître dans la jurisprudence, à côté de la notion du « chemin du travail » cher aux Tribunaux du même nom, la notion du « chemin du tireur et/ou chasseurs » propre cette fois aux Tribunaux Correctionnels.

L’article 23 alinéa 1 relatif aux dispositions pénales de la loi sur les armes connaît également une modification, en ce que celui-ci est étendu à l’énumération visée dans l’article 47 de la loi du 08 juin 2006.

L’on se souviendra que cet article 47 abrogeait les anciennes dispositions, sous réserve du maintien de l’application des arrêtés d’exécution de la loi de 1933, telle que modifiée en 1991 jusqu’à leur replacement, à la condition, toutefois, qu’ils ne soient pas, toutefois, en contradiction avec la nouvelle législation.

L’article 24, alinéa 2 de la loi répond au souci des musées publics qui s’insurgeaient de voir des armes de haute valeur et de grand intérêt historique, faire l’objet d’une disposition ordonnant leur destruction systématique.

Ainsi, l’alinéa 6 in fine de l’article 23 a été modifié, en ce que les armes qui seront saisies et réservées aux musées ne doivent plus être rendues inaptes au tir avant d’être remise.

Cette modification correspondait également à une demande du banc d’épreuve qui était saturé de demandes de démilitarisation, et ne pouvait en temps raisonnable y répondre valablement.

L’article 27 comporte un ensemble de dérogations à la législation qui intéressent spécifiquement les commandes d’armes et de munitions de l’Etat et des administrations publiques.

Cet article connaît une modification également, en ce que le paragraphe 4 autorise maintenant les collectionneurs agréés à pouvoir détenir, acquérir ou importer, pour des collections privées, des armes à feu, tout en se conformant aux dispositions réglementaires prévues.

La nouvelle disposition de la deuxième partie du paragraphe 4 semble même autoriser l’obtention d’un agrément de collectionneur pour du matériel qui en principe est réservé à l’Etat et à ses services publics.

En ce cas, par dérogation à l’article 6, § 1 de la loi du 08 juin 2006, lesdits objets sont assimilés à des armes à feu.

L’article 28 est relatif aux mesures de contrôle de la loi ; il est à noter que conformément aux recommandations précises de la Cour Constitutionnelle, le paragraphe 2 a été modifié, ne permettant plus aux policiers de procéder à une saisie administrative provisoire des armes et munitions. L’intervention du Juge semble retrouver toute sa place.

En son alinéa 2 du paragraphe 2, le délai accordé au Gouverneur pour répondre à la demande d’autorisation est porté de un mois à trois mois une fois le récépissé délivré. Il est à noter qu’à défaut de réponse valable, les objets saisis sont libérés, ainsi que les agréments, permis et autres autorisations restitués, mais le législateur a prévu cependant que cette remise s’opérait sans préjudice de toute saisie judiciaire.

Le paragraphe 2 comporte maintenant un troisième alinéa, en ce que la saisie et la décision du Gouverneur peuvent également se rapporter à des armes à feu en vente libre, sous la condition que ces armes de panoplie tirent des projectiles.

L’on imagine, dès lors, qu’il s’agit de toute arme à feu pouvant tirer des projectiles, ce qui exclurait les armes démilitarisées qui sont aussi par définition des armes de panoplies.

D’aucuns trouvent là l’expression de la volonté du législateur du 25 juillet 2008 d’incorporer les armes de panoplie à un régime général global.

L’article 29 vise le constat des infractions à la législation sur les armes.

L’on se souviendra que la Cour Constitutionnelle avait annulé l’article 29 § 1, alinéa 2, point 1. L’ancienne disposition permettait à toute autorité policière, sans le contrôle d’un Magistrat, et à fortiori d’un Juge d’Instruction, de perquisitionner de jour comme de nuit et en quelque lieu que ce soit (article 29, § 1,2°,1). La Cour Constitutionnelle avait stigmatisé cette dérogation au droit pénal commun comme disproportionnée (Voir Arrêt de la Cour, numéro 77.6 et 77.5). Cette disposition a été abrogée .Pour le surplus, la nouvelle législation s’est contentée de remplacer la compétence de police locale attribuée in fine par l’article à la police fédérale. Mais le Législateur a pris parallèlement à la Loi de 2006, d’autres mesures pour augmenter les moyens judiciaires de contrôle et d’enquête. Ainsi le moniteur a publié le 16 juin 2006une loi non autrement intitulée que « Loi portant des dispositions diverses ».

Cette loi comporte un article 90 ter qui précise : » Lorsque les nécessités de l’instruction l’exigent, le juge d’instruction peut, à titre exceptionnel, écouter, prendre connaissance et enregistrer, pendant leur transmission, des communications ou des télécommunications privées, s’il existe des indices sérieux que le fait, dont il est saisi constitue une infraction visée par l’une des dispositions énumérées au § 2, et si les autres moyens d’investigation ne suffisent pas à la manifestation de la vérité. (En vue de permettre l’écoute, la prise de connaissance ou l’enregistrement direct de communications ou télécommunications privées à l’aide de moyens techniques, le juge d’instruction peut également à l’insu ou sans le consentement de l’occupant, du propriétaire ou de ses ayants droit, ordonner la pénétration, (à tout moment), dans un domicile ou dans un lieu privé). La mesure de surveillance ne peut être ordonnée qu’à l’égard soit de personnes soupçonnées, sur la base d’indices précis, d’avoir commis l’infraction, soit à l’égard des moyens de communication ou de télécommunication régulièrement utilisés par un suspect, soit à l’égard des lieux présumés fréquentés par celui-ci. Elle peut l’être également à l’égard de personnes présumées, sur la base de faits précis, être en communication régulière avec un suspect ».

Or le § 2, point 16 étend cette disposition importante à la Loi sur les armes » : 16° à l’article 10 de la loi du 05 août 1991 relative à l’importation, à l’exportation et au transit d’armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire et de la technologie y  afférente ».

On notera que ce pouvoir est donné au procureur du Roi en cas de flagrant délit (article 90 ter, § 5) et aux autorités étrangères compétentes (article 93 ter, § 6).

Au titre de la répression pénale, on notera l’article 107, 3° du nouveau Code Forestier, selon le décret du 15 juillet 2008 publié au Moniteur, le 12 septembre 2008, en page 47631. Cette disposition prévoit que les peines stipulées dans le code forestier seront doublées « 3° lorsque le contrevenant est porteur d’un outil de coupe, d’extraction ou d’une arme ».

L’article 31 vise la compétence du Gouverneur quant aux agréments conformément aux articles 5, 6, 20 et 21 de la loi.

En ce qui concerne les demandes d’autorisation de permis visés aux articles 11, 14 et 17, celui-ci doit se prononcer dans les quatre mois de la réception de la demande. Une nouvelle disposition s’insère en cet article, en ce sens que la prolongation ne peut plus être accordée qu’une seule fois par demande, et que sa durée ne peut excéder 6 mois.

L’article 32 de la loi du 08 juin 2006 connaît de profondes modifications.

L’on se souviendra que la loi du 08 juin 2006 permettait une validité maximale de 7 ans aux agréments visés par l’article 5, et prévoyait un ensemble de conditions quant au renouvellement.

Au regard des dispositions de la Cour Constitutionnelle, le Législateur du 25 juillet 2008 précise que les agréments et autorisations sont délivrés pour une durée indéterminée, à l’exception du port d’armes qui connaît sa période de renouvellement obligatoire.

Le législateur cependant dispose qu’une fois tous les 5 ans, « le Gouverneur prend l’initiative de vérifier si tous les titulaires d’agréments et d’autorisations visés par la présente loi, à l’exception des permis de port d’armes, respectent la loi et satisfont encore aux conditions pour la délivrance de ces autorisations et agréments ».

Il est expressément prévu que le Gouverneur interroge à cet effet la Police locale et éventuellement le Ministère Public.

Il fine, les nouvelles dispositions précisent que « s’il apparaît que la détention de l’arme peut porter atteinte à l’intégrité physique de personnes ou que le motif légitime invoqué […] n’existe plus, le Gouverneur peut limiter, suspendre ou retirer l’autorisation par décision motivée… »

L’article 34 est abrogé ; cet article prévoyait que le Roi était autorisé à étendre en tout ou partie aux armes autres que les armes à feu, les dispositions des articles principaux de la loi du 08 juin 2006.

L’on se souviendra qu’en ce qui concerne les armes de panoplie, d’aucuns au Ministère de la Justice avaient la ferme intention d’user et d’abuser des arrêtés royaux pour étendre au maximum aux armes de panoplie, les dispositions extrêmement restrictives de la loi du 08 juin 2006.

Le législateur du 25 juillet 2008 a écarté cette possibilité qu’il a cependant rouverte en permettant l’assimilation des armes de panoplie aux armes soumises à autorisation, tel que précisé ci-avant.

En réalité, deux conceptions s’affrontent actuellement au Ministère de la Justice à savoir d’une part, l’idée que les armes de panoplie doivent être de commerce libre, car ne présentant aucun danger réel, tandis qu’une autre conception considère que toute arme doit être l’objet d’un règlement, en manière telle que par le biais d’une éventuelle soumission des armes de panoplie au régime de la déclaration, l’on retrouverait les conditions d’application de la loi du 08 juin 2006, même en tenant compte de la suppression de l’article 34 de par la loi du 25 juillet 2008.

L’article 36 vise le conseil consultatif des armes et le service fédéral des armes. La composition de ce Conseil a été modifiée par l’AR du 13 décembre 2009 publié au Moniteur, le 18 décembre 2009.

Il s’agit de deux services qui dépendant du Ministère de la Justice et ont des missions spécifiques.

Ces services avaient pour objet d’être un lieu d’expression des différentes sensibilités, mais de plus en plus se révèle comme une antichambre de textes soumis à l’appréciation du Ministre.

Plusieurs voies se sont déjà exprimées pour dire clairement que, notamment, le conseil consultatif était l’expression de certaines sensibilités non-majoritaires dans le domaine des chasseurs, des tireurs et des collectionneurs.

Sa validité en qualité de représentant des différentes sensibilités des amateurs d’armes est donc régulièrement mise en doute.

C’est dans cette antichambre du Ministère de la Justice que l’on trouve, notamment, l’idée de faire « passer » les armes de panoplie du « commerce libre » au statut d’objets soumis à la loi du 08 juin 2006.

L’article 44 a été modifié, en ce que le dernier délai d’application de la loi prévu au 30 juin 2007 avait été reporté au 31 octobre 2008. Cet article connaît une autre modification, en ce qu’il est maintenant prévu un régime transitoire sur la validité des autorisations antérieures, puisque l’alinéa 2 du paragraphe 1 précise « dans l’attente de la décision de délivrer ou non l’autorisation conformément aux dispositions de la présente loi, la demande d’autorisation vaut autorisation provisoire ».

Il convient donc pratiquement d’être attentif à sauvegarder pour pouvoir justifier de la légitimité de la détention, non seulement l’ancienne autorisation, mais également la demande de la délivrance d’une nouvelle, selon les nouvelles dispositions.

Au paragraphe 2 du même article, il existe la même modification de l’application de la loi dans le temps, c’est-à-dire à la date du 31 octobre 2008.

S’ajoutent deux autres alinéas visant au renouvellement des autorisations obtenues antérieurement à la loi du 8 juin 2006 pour les chasseurs et tireurs sportifs.

Le même mécanisme est prévu, à savoir l’ancienne autorisation et la demande de renouvellement valant autorisation provisoire.

L’article 47 connaît deux modifications, à savoir que d’une part, les anciennes dispositions de la loi de 1933 sont maintenant, semble-t-il, toutes abrogées, et qu’autre part, le terme de validité de 5 ans antérieurement prévu pour les agréments est supprimé.

L’article 49 vise l’entrée en vigueur de la nouvelle loi du 25 juillet 2008, soit au 01er septembre 2008, à l’exception de l’article 4, comme indiqué ci-avant, qui n’entrera en vigueur que le 01er janvier 2010.

La nouvelle disposition du 25 juillet 2008 modifie encore les droits et redevances relatifs à l’obtention des autorisations et agréments. En application de la loi du 08 juin 2006, le Législateur avait établi par sa loi-programme du 27 décembre 2006, l’article 352 fixant taxes et redevances.

Ces droits et redevances avaient été lourdement critiqués par les milieux des collectionneurs et amateurs d’armes, puisqu’ils rendaient extrêmement cher la possession d’aucune arme. Ceux-ci sont maintenant redéfinis et semblent plus acceptables. En ce sens, la Cour Constitutionnelle avait été saisie de différents recours, et s’est prononcée par l’arrêt du 19 mars 2008 (numéro de rôle 4248), publié le 02 avril 2008 au Moniteur. Cet arrêt rejetait les recours, mais la condamnation de l’expropriation par l’arrêt du 19 décembre 2007 devait, là encore, être rencontrée, en manière telle que la loi du 25 juillet 2008 introduit un système de droits et redevances forfaitaire et limité.

Au terme de cet exposé rapide, il convient peut-être d’établir une synthèse un peu plus claire.

Synthèse.

La loi du 25 juillet 2008 modifiant la législation du 08 juin 2006 peut être grossièrement résumée en quatre points.

Premièrement, la nouvelle législation permet une détention qualifiée de passive, c’est-à-dire sans munitions aux personnes qui se voyaient privées du droit d’obtenir une autorisation de détention, à raison du fait qu’elles n’étaient pas tireurs ou chasseurs. Ainsi, les personnes qui avaient une arme sous une autorisation valable avant la loi de 2006, les personnes qui ont hérité d’une arme détenue légalement, ainsi que les chasseurs ou les tireurs sportifs qui abandonnent leurs pratiques, peuvent maintenant conserver l’arme sans avoir accès aux munitions.

A cet égard, comment combiner cette interdiction d’accès aux munitions avec le fait que l’article 12, 5° de la nouvelle loi du 25 juillet 2008 autorise expressément l’usage d’une arme détenue dans ces conditions « une fois par an » ???

Deuxièmement, l’autorisation de détention d’armes devient à durée indéterminée, sous la réserve de ce qui est précisé à l’alinéa 2 de l’article 32, en ce que le Gouverneur prend l’initiative de vérifier tous les 5 ans, les conditions propres à la loi du 08 juin 2006. La procédure de demande d’autorisation est accélérée, puisque le Gouverneur se voit accorder un délai maximal de 4 mois.

Troisièmement, les chasseurs et les tireurs sportifs se voient bénéficier d’un ensemble d’aménagements tout à fait favorables. L’on notera la disparition de l’attestation médicale et de l’épreuve théorique et pratique, la possibilité du prêt d’armes, la détermination des conditions du port d’armes au lieu d’exercice de leur activité, et la possibilité de conserver les armes sans munitions en cas d’arrêt d’activité.

Quatrièmement, les collectionneurs et les musées se voient également gratifiés de modifications tout à fait favorables. La limitation des droits et redevances est un élément tout à fait apprécié, tandis que le fait de pouvoir obtenir un agrément de collectionneur à partir de 5 armes et non de 10, permettra d’éviter les droits relatifs aux 5 dernières armes. L’accès aux bourses aux armes est enfin rendu aux amateurs et non plus réservé aux professionnels. Il faudra cependant être particulièrement attentif, pour les motifs invoqués ci-avant, à l’interprétation restrictive qui semble, par le biais des arrêtés royaux et des arrêtés d’application, vouloir à nouveau contrer la portée de l’arrêt de la Cour Constitutionnelle, d’une part, et des modifications de la loi du 25 juillet 2008 d’autre part.

Je termine en rendant particulièrement attentif le lecteur à la prise en compte de l’arrêté du 09 juillet 2007.

Exposé heuristique relatif à trois dispositions ayant pour objet les armes de panoplie.

A) l’AR du 09 juillet 2007.

Le 02 août 2007 a été publié au Moniteur belge en page 40.731, l’arrêté royal du 09 juillet 2007 exécutant certaines dispositions de la loi du 09 juin 2006 réglant des activités économiques et individuelles avec des armes.

Cet arrêté royal a été corrigé par une publication au Moniteur belge faite le 04 avril 2008 en page 18.282, et comportant la présentation d’un tableau.

Le lecteur averti a déjà compris qu’il s’agissait du listing des armes de panoplie par définition en vente libre, sous les réserves de la loi du 08 juin 2006, telle que modifiée par la loi du 25 juillet 2008.

L’on se souviendra que le genre « armes de panoplie » est composé de différents sous-ensembles dans lesquels on trouve notamment :

– Les armes non à feu (armes à air –sous deux restrictions-, paintball, soft gun, …)
– les armes démilitarisées et certifiées comme telles par le Banc d’Epreuve de Liège
– les armes blanches (sous réserves des armes blanches prohibées).
– les armes factices.
– les armes à feu répondant à certaines conditions.

Cette partie de l’exposé ne concerne qu’une catégorie des armes de panoplie à savoir les armes à feu.

Pour faire simple, le 04 avril 2008, est publié au Moniteur en page 18.282, un listing d’armes à feu qui sont toutes considérées comme armes de panoplie, et dès lors, en vente libre, sous réserve cependant, des interdictions de la loi du 08 juin 2006, comme le commerce par internet.

Il s’agit donc d’armes à feu non démilitarisées.

Elles sont simplement considérées comme d’un intérêt historique, voir esthétique, d’une part, et d’autre part, sans capacité de représenter un réel danger social.

Ce sont par essence, des armes de collection.

Le législateur, conformément aux dispositions de la loi du 08 juin 2006 a donc établi un tableau exhaustif des armes à feu dites de panoplie. Ce tableau est parallèle aux critères généraux de l’arrêté royal du 20 septembre 1991 relatif aux armes à poudre noir, dont le modèle ou le brevet est antérieur à 1890, et dont la fabrication est antérieure à 1945.

On y trouve, dès lors, des fusils et des armes de poing à poudre vive.

Ces armes représentent souvent une valeur patrimoniale tout à fait considérable. Il est heureux que le législateur ait empêché que les particuliers aient à s’en dessaisir ou à les faire « massacrer » par le Banc d’Epreuve pour obtenir un certificat de démilitarisation.

Ainsi, le législateur a-t-il répondu aux demandes des collectionneurs. Il est à espérer que cette liste sera réactualisée en considérant les demandes des collectionneurs.

De lege ferenda, d’aucuns auraient souhaité voir des critères objectifs retenus par le législateur.
Ainsi, on aurait pu considérer comme armes à feu de panoplie, toutes les armes antérieures à 1945, à l’exception des armes full auto. On aurait également pu retenir toutes armes construites de plus de 50 ans…

Il aurait aussi été opportun de régler clairement le sort des armes démilitarisées et, notamment, la question de la validité en droit interne, des poinçons de démilitarisation d’autres pays, alors que les autres poinçons sont déjà reconnus par la Commission Internationale Permanente pour l’Epreuve des Armes à feu, selon la Convention du 01er juillet 1969.

On aurait pu s’inspirer encore de l’article 1 § 2 de l’arrêté royal du 18 novembre 1996, publié le 20 décembre 1996, relatif au classement des armes dites d’alarme, selon l’ancienne loi de 1991 ; qui dispose : « La procédure d’homologation est décrite en annexe du présent arrêté. S’il est établi, au moyen des documents nécessaires délivrés par un organisme autorisé, qu’un modèle d’arme a subi des essais d’homologation de classification équivalente dans un autre pays membre de l’E.E.E., ce modèle d’arme est considéré comme satisfaisant aux spécifications techniques fixées par le présent arrêté ».

A l’heure de l’Europe, le souci d’une certaine uniformisation n’eût pas été mal venu, d’autant que l’effort de la carte européenne de tireur est déjà réalisé

B) l’A.R. du 16 octobre 2008.

La journée du 20 octobre 2008 était propice à trois publications, dont un arrêté royal du 16 octobre 2008 modifiant divers arrêtés d’exécution de la loi sur les armes. Cet arrêté royal est absolument et définitivement illisible !

Un des considérants donne le ton : « Vu l’urgence motivée par la circonstance que la loi du 25 juillet 2008 modifiant la loi sur les armes stipule que les articles de la Loi sur les armes qui ne sont pas encore entrés en vigueur, entrent en vigueur le 01er septembre 2008; qu’ils doivent recevoir les dispositions exécutoires nécessaires pour cette date pour que la sécurité juridique soit assurée; que pour des raisons pratiques, il est souhaitable de faire entrer en vigueur en même temps les modifications à la loi sur les armes apportées par la même loi et de mettre un terme à la confusion régnant depuis trop longtemps en matière de l’application de la loi sur les armes; que la partie restante de la période transitoire qui se termine le 31 octobre 2008 doit être la plus longue possible dans l’intérêt du citoyen qui veut s’en servir ».

On constatera que cet arrêté royal modifie les dispositions de l’arrêté royal du 20 septembre 1991, antérieur, faut-il le dire, à la loi du 08 juin 2006 et la loi du 25 juillet 2008, en ce que cet arrêté royal avait été modifié par l’arrêté royal du 29 décembre 2006. Or, on se souviendra que tant le législateur de 2006 que celui de 2008 ont exprimé leur volonté d’abroger les anciens textes.

Et bien, non ! Il faut encore connaître et appliquer les anciens arrêtés d’avant 2006, et combiner les notions incompatibles de la loi de 1933 avec celles de 2006 modifiées en 2008.

C’est donc l’arrêté royal du 20 septembre 1991 qu’il faut considérer, même si son article 1 est toiletté pour « coller » à la loi du 8 juin 2006. Or cet arrêté royal de 1991 dispose en son article 3 que : « Sont également considérés comme armes de panoplie, les armes à feu qui ont été rendues inaptes au tir, selon les modalités définies à l’article premier de l’arrêté royal du 20 juin 1984… »

Ainsi, par une seule disposition, toute l’ancienne législation se retrouve dans la nouvelle !

On notera que l’article 4 de l’arrêté royal du 16 octobre 2008 comporte l’expression de la lutte contre le blanchiment d’argent, notamment, puisque l’article 2 est modifié en ce sens « le demandeur d’un agrément visé aux articles 5 et 21 de la loi justifie l’origine des moyens financiers utilisés pour exercer son activité au moyen de preuves écrites valables, telles que des documents bancaires et des contrats financiers ».

Cela suppose nécessairement que les autorités de contrôle puissent, dès à présent, avoir accès à toute information financière relative au demandeur, selon les articles 5 et 21. On peut encore imaginer que ces informations pourraient être vérifiées près l’administration fiscale pour avoir toute leur pertinence.

Différentes dispositions qui n’ont plus lieu d’être sont maintenant abrogées, puisque remplacées par les nouvelles législations, mais l’on notera en l’article 13 que l’article 4 de l’arrêté royal du 20 septembre 1991 relatif aux armes à feu d’intérêt historique, folklorique ou décoratif, tel que modifié par l’arrêté royal du 29 décembre 2006, est maintenant complétée, en ce que la cession d’une arme visée aux articles 1, 4 et 6 emporte la procédure prévue à l’article 25 du même arrêté royal du 20 septembre 1991, soit la rédaction d’un modèle 9.

Il semblerait de facto que les armes de panoplie, telles que précisées ci-avant, sont maintenant soumises à un contrôle sous forme de la rédaction d’un modèle 9. Et on se souviendra alors du 3° alinéa du paragraphe 2 de l’article 28 de la nouvelle-nouvelle loi du 25 juillet 2008 qui dispose : « La saisie et la décision du gouverneur peuvent se rapporter également à des armes à feu en vente libre tirant des projectiles ».

Enfin, l’article 18 répond à l’exception prévue par l’article 12 de la loi du 25 juillet 2008 relatif au tireur occasionnel qui, lors d’une visite à un stand de tirs, détient une arme dans les conditions énumérées à l’article 16 d cet arrêté royal.

Cet arrêté royal est entré en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge, soit le 20 octobre 2008.

Que retenir de cette disposition en matière d’arme de panoplie ? Que celle-ci, à mon sens, fait « revivre » les arrêtés royaux de 1984,1991 et 1995 relatifs aux armes de panoplie, et qu’il conviendra, dès lors, de les examiner pour catégoriser une arme.

C) Les armes blanches.

L’article 2 de la loi du 08 juin 2006, en son point 13, définit les armes blanches comme étant : « toute arme munie d’une ou plusieurs lame(s) et comportant un ou plusieurs tranchant(s) ».

Le Grand Robert définit le mot « arme » comme : « un instrument d’attaque ou de défense ». (Grand Robert, tome I, page 236.)

La définition, telle que reprise en l’article 2 des nouvelles dispositions, semble opposer le mot « arme » à d’autres concepts, tels que « outil », « œuvre d’art » ou « jouet ».

La lecture des commentaires de la plaquette éditée en 2006 par le Ministère de la Justice, en vue de faciliter la compréhension des nouvelles dispositions, permet de découvrir en page 12 une énumération non exhaustive d’un ensemble d’armes, dont notamment, les épées, glaives, baïonnettes et autres.

D’après le commentaire que le Ministère de la Justice a publié quant à cette catégorie d’armes, la nouvelle loi ne changerait rien : « Quelle démarche devez-vous entreprendre ? La nouvelle loi ne change rien pour vous, sauf si votre arme était déjà soumise à autorisation sous l’ancienne législation.  Dans ce cas, la durée de validité de votre autorisation est limitée à cinq ans ». (La nouvelle loi sur les armes, Service public fédéral justice, page 12.)

Ici, comme dans d’autres dispositions de la loi du 08 juin 2006, il est donc fait référence expressément aux dispositions de la loi de 1933, en manière telle qu’on ne peut se permettre de faire l’économie d’une relecture des dispositions de l’ancienne législation.

On se souviendra à cet égard qu’en ce qui concerne les armes tranchantes et piquantes, le législateur de 1933 prévoyait, en son article 3, tel que modifié par la loi du 9 mars 1995, un principe, une exception et une exception à l’exception.

Ainsi, l’article 3 de la loi de 1933 disposait : « Sont réputées armes prohibées : […], les poignards et couteaux en forme de poignard, à l’exclusion des couteaux de chasse, les cannes à épée et  […] ».

D’un même contexte, étaient considérées comme armes prohibées : « toute arme offensive cachée ou secrète qui ne serait pas réputée arme de défense ou arme de guerre ».

Ainsi, l’on considérait généralement comme étant prohibés les poignards et couteaux en forme de poignard, ainsi que tout couteau pliant de type canif, comportant un mécanisme de blocage de la lame dit « cran d’arrêt ».

Généralement, il était admis qu’il s’agissait d’armes blanches courtes de nature à frapper d’estoc « de pointe », principalement par opposition à l’usage de taille « de tranchant ». L’on notera que les armes d’hast ne sont pas visées.

L’exception la plus notable était les poignards de chasse, et la jurisprudence avait considéré depuis de longues années que les baïonnettes n’entraient pas dans la catégorie des poignards prohibés.

L’on se souviendra que le poignard et le couteau à cran d’arrêt étaient, cependant, en détention libre, puisqu’à l’époque la détention d’armes prohibées était libre, ce qui a été changé par les nouvelles dispositions de la loi du 08 juin 2006.

La nouvelle loi du 08 juin 2006 introduit un principe de liberté et deux catégories d’exception ; l’une est objective, l’autre est circonstancielle ou subjective.

Pour tenter d’avoir une approche pragmatique de ces nouvelles dispositions, il conviendra de se référer au  principe énoncé par le point 1 du paragraphe 2 de l’article 3 de la nouvelle loi qui dit que : « Sont réputées armes en vente libre : les armes blanches, les armes non à feu et les armes factices, non soumises à une réglementation spéciale ».

Le nouveau législateur semble donc régler définitivement la question en considérant que toutes les armes blanches sont en vente libre, sous la réserve de l’interdiction prévue à l’article 19.1 concernant le commerce par correspondance.

Au rang de la prohibition objective, la nouvelle législation précise en son article 3 § 1er que sont réputées armes prohibées: « les couteaux à cran d’arrêt et à lame jaillissante, couteaux papillon, coups de poing américains et armes blanches qui ont l’apparence d’un autre objet ».

En ce même paragraphe 1er , au point 11, les couteaux à lancer sont expressément visés comme étant prohibés de même, et fort logiquement, les étoiles à lancer prévues au point 14, tandis que le point 16 permet au Ministre de la Justice et au Ministre de l’Intérieur de désigner par Arrêté Royal, tel type d’arme que l’un ou l’autre devrait considérer comme constituant un grave danger pour la sécurité publique.

Au rang de la prohibition objective ou circonstancielle, l’article 3 § 1er point 17 comporte un article de portée générale qui permet de considérer tout objet ou toute substance comme constituant une arme, s’il apparaissait clairement, au regard des circonstances, que celui qui l’a détient entend manifestement l’utiliser aux fins de menacer ou de blesser physiquement des personnes.

Ainsi, si le principe du paragraphe 2 point 1 est d’établir que toutes les armes blanches sont en vente libre et de commerce libre, les exceptions prévues par le paragraphe 1er permettent au législateur, d’une part, d’étendre la notion d’armes prohibées à toute arme blanche qu’il devrait considérer comme telle et, d’autre part, de considérer que tout objet c’est-à-dire un simple outil comme une hachette ou un marteau constitue une arme prohibée au sens de l’article 3 § 1er 17, à raison des circonstances de la cause.

Hors, l’extension possible par Arrêté Royal ou Arrêté Ministériel, d’une part, au sens de l’article 3 § 1 et 16, ou de la qualification ponctuelle et particulière par décision de jurisprudence au sens de l’article 3 § 1er17, restent les interdits prévus aux points 5, 6, 12 et 14.

L’article 3 § 1er point 5 prohibe les couteaux à cran d’arrêt qui sont également à lame jaillissante, ainsi que les couteaux papillon, les coups de poing américains et les armes blanches qui ont l’apparence d’un autre objet.

En ce qui concerne les armes blanches qui ont l’apparence d’un autre objet, il s’agit de la vieille notion d’arme vicieuse, cachée ou secrète, telle qu’elle était anciennement reprise par les dispositions de l’article 3 de la loi de 1933.

En cela, la législation n’a pas changé.

En ce qui concerne les couteaux à cran d’arrêt, le législateur a, pour une fois, pris une position pragmatique, en ce qu’il considère que sont prohibés les couteaux qui sont à cran d’arrêt si, et seulement si, ils sont également à lame jaillissante .Il y a là double condition. Il est à noter qu’à ma connaissance, une administration interprétait  le « ET » comme étant un « OU » et bloquait un ensemble d’importation. Ce problème est, à ce jour, réglé, et c’est bien l’addition des deux conditions qui doit être considérée.

On se méfiera de la confusion sur le processus d’ouverture de la lame, en ce que la simple force de gravité opérant ouverture ou sortie de la lame, suffirait au sens de la Loi pour remplir la condition de « jaillissante » (article 2, point 7 de la loi de 2006). Par contre, il est maintenant parfaitement clair que tous les couteaux à lame droite, à lame fixe, quelle que soit la forme de la lame, sont libres, sous réserve des couteaux de jet.

Cela veut dire concrètement que l’Opinel a quitté le statut d’arme prohibée pour rejoindre le statut des armes blanches tout à fait libres, puisqu’il faut pour que le couteau à cran d’arrêt soit prohibé et qu’il soit également à lame jaillissante.

L’interdit du couteau papillon se comprend mal, si ce n’est la transcription d’une poussée médiatique mal comprise. Il ne faudra pas confondre le couteau papillon avec l’emblème du papillon utilisé par la marque Benchmade.

En effet, le couteau papillon est ce qu’on appelle le couteau « Ballisong » originaire des Philippines, importé aux Etats-Unis, ensuite de la seconde guerre mondiale, lors du retour des G.I., et popularisé par des couteliers américains comme Benchmade, Spiderco ou Cool Steel.

Il s’agit d’un couteau comportant un manche en double partie qui s’ouvre et permet par une rotation à 360 degrés « d’ouvrir » le couteau et de le tenir en position ouverte par la fermeture, bloquée ou non, du manche sur lui-même. Le concept est définit par la loi du 08 juin 2006, en son article 2 point 8.

Ce couteau a été largement popularisé dans divers films de cinéma asiatique, et a occasionné de multiples blessures aux doigts de tous les gamins qui se sont essayés au genre de jonglerie dont il était fait promotion.

On comprend mal en quoi ce couteau serait plus dangereux qu’un autre ???

Qu’en est-il des couteaux papillon à valeur historique ou artistique ???

Le point 6 § 1er de l’article 3 prohibe les cannes à épée.

L’on se souviendra que l’article 3 §4 de la loi de 1933 qualifiait d’armes de panoplie : « les armes d’intérêt historique, folklorique et décoratif défini par le Roi… »

Considérant les nouvelles dispositions, il semble que les cannes épées soient à nouveau sous statut d’armes prohibées, à condition qu’elles ne soient ni décoratives, ni historiques, ce qui reprend l’ancienne exception des arrêtés royaux de 1991.  Le « ni » doit s’analyser comme étant un « ou » ce qui à nouveau transforme le Juge en arbitre des élégances et de l’esthétique ou en senseur de l’Histoire.

Le point 12 § 1er de l’article 3 prohibe encore les couteaux à lancer, ce qui était déjà le cas sous l’ancienne législation.

Toute la question est de savoir ce qu’est un couteau à lancer, même si ce terme est défini par le point 14 de l’article 2 en ce qu’un couteau à lancer est : « un couteau dont l’équilibrage particulier permet le lancement avec précision. »

En réalité ce type de définition n’a absolument aucun sens, puisque tout couteau peut être lancé d’une part, et d’autre part, chaque couteau connaît un point d’équilibrage « particulier ».

Le législateur prend bien soin de ne pas le définir, tant il est vrai qu’en fonction des différents couteaux à lancer, ce point d’équilibrage entre la pointe de la lame et la fin du manche, se trouve soit au milieu, soit à un tiers ou un quart. Il existe même des dispositifs permettant de faire varier ce point. En réalité, un couteau principalement prévu pour être lancé répond à un ensemble d’autres critères : il est de poids moyen, d’une seule pièce, avec une poignée simplifiée résistant aux chocs. Il y a peu ou pas de garde.  La lame est généralement symétrique, la pointe assez large pour ne pas trop s’abîmer et d’un alliage privilégiant une certaine souplesse sur la dureté. A ma connaissance, les seuls vrais couteaux à lancer se trouvent dans la culture africaine et comportent une multitude de lames aux axes opposés.

Rien à voir avec un point d’équilibre ! Là encore, on sent l’influence d’une certaine culture de série B !

Le point 14 § 1 de l’article 3 vise la prohibition, objective, des étoiles à lancer. Il s’agit des « surikken » ou « étoiles japonaises » que tout spectateur d’un film d’art martial a vu un jour abattre un immeuble de dix étages et égorger à deux cents mètres, une centaine de citoyens d’Asie.  Ces étoiles sont des armes de jet par nature, et l’on comprend que dans la philosophie de prohibition du couteau à lancer, elles connaissent le même sort contrairement à la législation française notamment.

Concrètement, que faut-il retenir des nouvelles dispositions : d’une part, qu’il n’y a plus de distinction entre poignards et couteaux et, d’autre part, que toutes les armes blanches en principe sont libres sous réserve des interdictions de l’article 19.

A cela, un ensemble d’exception doit être considéré, à savoir les énumérations objectives des armes blanches prohibées, telles que reprises en l’article 3, et telles que définies en l’article 2, d’une part et d’autre part, les énumérations qui seront très certainement publiées par Arrêté Royal ou par Arrêté Ministériel.

Enfin, à raison du principe énoncé par le point 17 du paragraphe 1er de l’article 3, une notion de prohibition subjective ou circonstancielle pourra être considérée. Ainsi, tout objet, et donc toute arme blanche, pourra être qualifiée d’arme prohibée dans un contexte de menace aux personnes.

Il conviendra, en outre, d’être particulièrement attentif à la portée de l’article 9 de la nouvelle loi du 08 juin 2006, en ce que le port d’une arme en vente libre n’est permis qu’à celui qui peut justifier d’un motif légitime.

Le législateur fait ici usage de bon sens, en laissant au Juge le soin d’apprécier la qualité du motif invoqué quant au port d’une arme blanche. En cela, il rejoint l’exception de l’exception de l’article 3 de la loi de 1933 qui permettait, notamment, aux chasseurs de disposer d’un poignard. Comme dit en préambule du présent article, on annonce régulièrement une loi réparatrice générale et globale en matière d’armes.

Il existe une tentation sécuritaire d’interdire purement et simplement tout couteau en ce compris le canif suisse, au motif que depuis la révision du statut des armes à feu, la criminalité se serait « rabattue » sur les armes blanches. Certains crimes en Angleterre qui ont défrayé la chronique,  montrent l’usage des armes blanches en matière de délinquance.

D’autres législations nationales interdisent purement et simplement les armes blanches autres que les couteaux de cuisine. Ainsi, en est-il, notamment, de la législation japonaise à l’égard des sabres (Katana).

Faut-il aller jusque-là ? Si ma mémoire me sert, se sont bien de simples cutters qui ont servi le 11 septembre 2001.

Le « rien ne change » de Madame le Ministre de la Justice méritait d’être nuancé.

Concrètement :

1. Est-ce une arme blanche ?
1.1. Si oui, est-elle longue ?
1.1.1. Si oui, est-ce une canne épée ?
1.1.1.1. Si oui, a-t-elle un intérêt décoratif ?
1.1.1.2. Si oui, a-t-elle un intérêt historique ?

Si deux fois non : prohibé.
1.1.2. Si non, la lame est-elle fixe ?
1.1.2.1. Si non, y a-t-il un cran d’arrêt ?
1.2.1. Si oui, la lame est-elle jaillissante ?

Si oui : prohibé !
1.2. Si oui, est-ce une étoile à lancer ?
1.2.1. Si oui, prohibé !
1.3. Si oui, est-elle visée par un arrêté royal ou ministériel ?
1.3.1. Si oui, prohibé !
1.4. Si non, le port ou le transport, a-t-il comme objectif de menacer ou blesser ?
1.4.1. Si oui, prohibé !

Le Statut de l’armurier : histoire emblématique de la loi sur les armes.

A. L’AR du 16 octobre 2008.

Le premier arrêté royal, relatif au statut de l’armurier daté du 16 octobre 2008, est publié le 20 octobre 2008.

Cet arrêté royal peut être analysé, en ce qu’il comporte deux volets bien distincts.

Le premier volet est relatif à l’obtention de l’agrément d’armurier et vise les conditions et les examens propres à cette qualité.

Ainsi, le chapitre 1 précise que tout candidat armurier doit joindre à sa demande une attestation de réussite de l’examen d’aptitude professionnelle, tandis que le chapitre 2 encadre les conditions d’examen de ladite aptitude professionnelle. On y trouvera, notamment, en son article 4 la composition du jury d’examen qui comportera, notamment, la présence du Directeur du banc d’Epreuve ou de son délégué, ainsi qu’un fonctionnaire de police ayant des connaissances spécifiques.

Comme nous sommes en Belgique, le point 4 de l’article 4 prévoit un représentant francophone et un représentant néerlandophone ; on n’a pas prévu de représentant germanophone.

On notera, res curiosa, que  la matière, ses conditions ne sont toujours pas précisés ! Par contre, il y aura des épreuves techniques, théoriques et… déontologiques (article 3), et la composition du jury est arrêtée (article 4).

Le chapitre 3 du même arrêté royal instaure en Belgique un Code de Déontologie de l’armurier. Ce Code de Déontologie comporte les obligations professionnelles de l’armurier (article 10), la responsabilité envers la société (articles 11 et 12), les modalités techniques d’exercice (articles 13 et 14), la responsabilité de l’armurier (articles 17 et 18), et enfin les incompatibilités (article 19).

Il est à noter que cet arrêté royal entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge, soit le 20 octobre 2008.

L’on notera au titre des obligations déontologiques de l’armurier que celui-ci et son personnel sont « tenus de fournir aux autorités de surveillance tous les renseignements nécessaires à un contrôle approprié » (art. 12). La notion de contrôle est évidement différente de la notion d’enquête et fait sans doute référence aux dispositions de la loi du 25 juillet 2008 relatives au contrôle que le Gouverneur peut exercer tous les 5 ans. Mais qui réellement peut opérer ce contrôle, Est-ce à l’initiative autonomique de la Police fédérale, faut-il une apostille d’un Magistrat, Est-ce purement administratif ??? Quel est l’étendue de ce contrôle et est-il assimilable à une visite domiciliaire consentie ? Peut-on le refuser ? Un PV sera-t-il rédigé ?

Ce contrôle n’est cependant pas autrement explicité en manière telle que l’on peut imaginer que l’obligation de répondre à toute demande d’une autorité « de surveillance » est justifiée ontologiquement par la simple expression d’un contrôle en cours.

Au titre de la responsabilité de l’armurier, on notera l’interdiction pour un armurier de répondre à une demande d’un tiers qui rechercherait un avantage illicite ou immoral ou qui veut abuser de ses services selon l’expression de l’article 17.

Si l’on peut comprendre la définition d’un acte illégal voir illicite, l’arrêté royal reste muet quant à la définition « d’un avantage immoral ». On se perd en conjonctures à déterminer ce qu’est un acte immoral distinct des interdictions du Code Pénal…

L’article 19 dispose en son alinéa 2 que l’armurier « s’abstient de tout contact avec des personnes dont il sait ou dont il est de notoriété publique qu’elles fréquentent des milieux ne respectant pas les principes de la démocratie tels qu’énoncés notamment par la Constitution ou par la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales, par la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme et la xénophobie et par la loi du 23 mars 1995 tendant à réprimer la négation, la minimisation, la justification ou l’approbation du génocide commis par le régime national-socialiste allemand pendant la seconde guerre mondiale ou tout autre forme de génocide ».

Cette disposition extrêmement large pourrait être brutalement résumée par l’interdiction pour les armuriers d’avoir le moindre contact avec des gens politiquement incorrects. Au regard du principe constitutionnel de la liberté de conviction, voilà bien, pour la première fois à ma connaissance, instaurée pour un commerçant l’obligation d’être le censeur moral de ses clients.

L’article va encore plus loin, puisqu’in fine, il dispose « il s’abstient de tout contact ou comportement susceptibles de le rendre sensible au chantage et ne participe pas à des jeux de hasards dans des casinos ».

Voilà revenue la vieille interdiction de casino, telle qu’on la connaissait pour les Notaires et les Curateurs de faillite notamment.

B) Le Conseil d’Etat et le nouvel AR du 11 juin 2011.

Comme il fallait s’en douter, un recours au Conseil d’Etat a été introduit contre l’AR du 16 octobre 2008.

Par son arrêt du 25 novembre 2010 numéroté 209.232, le Conseil d’Etat a cassé cette disposition, en manière telle qu’un nouvel AR du 11 juin 2011 a été publié au Moniteur, le 17 juin 2011.

Si le premier comportait 21 articles, le second qui en est largement inspiré, n’en comporte plus que 19.

On notera la disparition de l’article 8 ancien qui visait l’exemption de l’examen d’aptitude professionnelle pour les armuriers postulant renouvellement de leur agrément, au sens de l’article 48, alinéa 3 de la loi de 2006.

L’article 9 ancien a également été supprimée : celui-ci créait une infraction sui generis qui permettait au Gouverneur de refuser, retirer, suspendre ou limiter l’agrément  « en cas de danger pour l’ordre public, si les anciens articles 10 à 12 et 15 à 19 n’étaient pas « observé » par l’armurier. Il y avait là, une présomption de faute que le nouveau texte ne reprend pas.

Par contre, les incompatibilités, telles qu’énumérées à l’ancien article 19, sont intégralement reprises à l’article 18 nouveau.

Il est peu acceptable que l’on transforme un commerçant en censeur et certificateur de la moralité de ses clients, d’autant que n’ayant pas les qualités de fonctionnaires de police, on peut raisonnablement s’interroger sur le fondement légal d’une démarche positive et inquisitoriale de la part dudit commerçant que l’on encourage à être sensible à la rumeur, appelée pour les besoins du texte « notoriété publique ».

De quel droit, de quel pouvoir un armurier serait-il autorisé, et de par le texte « obligé », à être le certificateur de partie des dispositions du nouvel article 18, reproduit ci-après.

Art. 18. L’armurier ne peut pas exercer d’autre profession dans les locaux où il fait le commerce ou expose des armes, des munitions ou des pièces de celles-ci, si la combinaison des deux activités est susceptible de créer un risque pour l’ordre public.

Il s’abstient de transactions commerciales avec des personnes, dont il sait ou, dont il est de notoriété publique qu’elles fréquentent des milieux ne respectant pas les principes de la démocratie, tels qu’énoncés, notamment, par la Constitution ou par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, par la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme et la xénophobie et par la loi du 23 mars 1995 tendant à réprimer la négation, la minimisation, la justification ou l’approbation du génocide commis par le régime national-socialiste allemand pendant la seconde guerre mondiale.

Il s’abstient de tout acte ou comportement susceptible de le rendre sensible au chantage, et il ne participe pas à des jeux de hasard dans des casinos.

Le recours administratif organisé devant le ministre de la justice ou son délégué par l’article de la loi du 08 juin 2006 réglant des activités économiques et individuelles avec des armes.

Parmi les méandres de la nouvelle réglementation, a été créé un recours spécifique devant le ministre de la Justice, ou son délégué. L’objet de cette étude nécessairement non-exhaustive est d’approcher ce recours.

Sous l’intitulé « Dispositions diverses » du chapitre XV, l’article 30 de la loi organisait un recours administratif devant le ministre de la Justice ou son délégué à l’encontre des décisions rendues par les gouverneurs de province « refusant, limitant, suspendant ou retirant un agrément, une autorisation, un permis ou un droit » sollicité par un citoyen, ou contre une absence de décision dans les délais fixés par l’article 31. Ce recours administratif organisé peut être valablement exercé depuis le 09 janvier 2007, date d’entrée en vigueur de l’article 30 de la loi. Il répond à un ensemble de caractéristiques touchant aux formalités de son introduction, à son traitement et à ses effets communes à ce type de recours administratifs.

L’institution d’une obligation générale d’autorisation pour toutes les armes à feu dans le cadre d’une politique globale de prévention répond aux exigences de l’Union européenne. Ainsi, était annoncé un des objectifs poursuivi par la loi du 08 juin 2006 réglant des activités économiques et individuelles avec des armes.

Sous le régime ancien de la loi de 1933, principalement modifiée par la loi de 1991, on se souviendra qu’il existait deux autorités différentes pour délivrer les autorisations de détention / acquisition. Il appartenait aux commissaires de police, et à défaut aux commandants de gendarmerie,  de décider librement de leur politique de délivrance d’autorisation en matière d’armes de défense (armes de poing principalement), tandis que les armes de guerre (armes automatiques, armes utilisées pour l’équipement de la troupe…) relevaient de l’autorité du gouverneur de province. On se souviendra que les armes de chasse étaient soumises au simple régime de la déclaration, sans autorisation préalable, tandis que les armes de panoplie, en vente libre, étaient énumérées dans les arrêtés royaux de 1984, 1991 et 1995. On se souviendra encore de la notion de « dépôt » d’armes (de défense ou de guerre – les armes de chasse n’étaient pas visées) qui relevait de l’autorisation du gouverneur de province. La volonté du législateur du 08 juin 2006 a été d’unifier et de déférer à une seule autorité, la délivrance des autorisations d’acquisition et de détention des armes à feu, la classification armes de défense / armes de guerre / armes de chasse ayant été supprimée. Ainsi, la possession d’une arme à feu doit nécessairement être autorisée par le gouverneur de province (les exceptions des armes de panoplies, des régimes de collectionneurs, musées, tireurs sportifs et chasseurs ne seront pas développées ici). Cette centralisation du pouvoir décisionnel en faveur des gouverneurs s’accompagne de la création d’un recours administratif contre leur décision – et absence de décision – devant le ministre de la Justice.

L’article 31 de la loi du 08 juin 2006, tel que modifié par la loi du 25 juillet 2008, fixe le pouvoir décisionnel du gouverneur de province dans les termes suivants :

« Le gouverneur se prononce :

1° sur les demandes d’agrément conformément aux articles 5, 6 (agréments des armuriers, des intermédiaires, des collectionneurs d’armes et de toute personne exerçant certaines activités professionnelles impliquant la détention d’armes à feu), 20 (agrément relatif à l’exploitation d’un stand de tir) et 21 (agrément relatif au transport d’armes à feu), dans les quatre mois de la réception de celles-ci ;

2° sur les demandes d’autorisation ou de permis conformément aux articles 11 (détention d’arme à feu soumise à autorisation et des munitions y afférentes), 14 (port d’arme à feu soumise à autorisation) et 17 (demande d’autorisation pour la détention d’armes y soumises qui ont été acquises dans des circonstances autres que celles prévues aux articles 11 et 12), dans les quatre mois de la réception de celles-ci.

Sous peine de nullité, les délais prescrits par la présente loi, dans lesquels le gouverneur ou le ministre de la justice sont tenus de prendre une décision, ne peuvent être prolongés que par décision motivée.

La prolongation ne peut être accordée qu’une seule fois par demande et sa durée ne peut excéder six mois ».

L’article 30 de la loi du 08 juin 2006 organise le recours devant le ministre de la Justice :

« Un recours est ouvert auprès du ministre de la Justice ou de son délégué, en cas d’absence de décision du gouverneur, dans les délais visés à l’article 31, ou contre les décisions refusant, limitant, suspendant ou retirant un agrément, une autorisation, un permis ou un droit, à l’exception des décisions concernant des demandes irrecevables.

Sous peine d’irrecevabilité, la requête motivée est adressée sous pli recommandé au service fédéral des armes, au plus tard quinze jours après avoir constaté l’absence de décision dans les délais visés à l’article 31, ou après avoir eu connaissance de la décision du gouverneur, accompagnée d’une copie de la décision attaquée. La décision est rendue dans les six mois de la réception de la requête. »

§ 1. Les formalités liées à l’introduction du recours

Le recours doit être introduit par requête motivée.

Cette dernière doit être adressée par pli recommandé au service fédéral des armes, crée par l’article 36 de la loi du 08 juin 2006, dans un délai de quinze jours à partir de la constatation de l’absence de décision du gouverneur, ou à partir de la prise de connaissance de sa décision « limitant, suspendant ou retirant un agrément, une autorisation, un permis ou un droit, à l’exception des décisions concernant des demandes irrecevables ». La difficulté réside dans l’exacte computation du délai de quinze jours. Dans la mesure où l’article 2 du Code judiciaire ne peut être invoqué, alors il y a lieu de considérer que c’est la règle générale applicable en matière administrative qu’il y a lieu de respecter : « le dernier jour pour introduire le recours est celui de l’échéance, même s’il s’agit d’un jour férié, sauf si un texte en dispose autrement », ce qui n’est pas le cas ici.

Rien n’est dit spécifiquement dans cet article 30 quant aux conditions requises pour introduire un recours devant le ministre de la Justice, mais il y a lieu à ce sujet d’avoir égard au prescrit de l’article 5 § 4 de la loi qui énonce l’ensemble des circonstances dans lesquelles une demande sera jugée irrecevable, circonstances qui sont toutes en lien avec le passé judiciaire du demandeur.

Le recours est donc ouvert auprès du ministre de la Justice ou son délégué, mais c’est au service fédéral des armes (en abrégé S.F.A créé par l’article 36 de la loi du 08 juin 2006) qu’il doit être adressé. Ce service relève de la direction « Droit pénal », troisième pilier de la Direction générale Législation, Libertés et Droits fondamentaux du S.P.F. Justice. Il existe depuis le 09 juin 2006, date de l’entrée en vigueur de la loi du 08 juin 2006. A ce jour, c’est ce service qui se prononce sur les recours introduits en application de l’article 30 de cette loi.

La situation nous paraît curieuse, dans la mesure où les tâches qui sont réservées au S.F.A. sont strictement définies à l’article 36 de ladite loi, qui ne lui reconnaît aucune compétence pour se prononcer sur les recours formés contre les décisions des gouverneurs. La loi prévoit que ces recours soient tranchés par le ministre ou son délégué. Sans doute, peut-on voir en la personne de Monsieur Filip IDE, président du Service Fédéral des Armes, le délégué annoncé pour trancher lesdits recours, ce qui expliquerait le rôle joué par le S.F.A. dans leur traitement, mais nous ne relevons à ce jour aucun texte le désignant officiellement comme étant le délégué du ministre de la Justice compétent pour ce faire. Il nous paraît, dès lors, qu’à ce stade, ce ne serait que par application de la théorie du fonctionnaire de fait que l’ensemble des décisions rendues par le Service Fédéral des Armes sur les recours introduits à destination du ministre de la Justice ou de son délégué (toujours non-officiellement désigné) pourraient conserver leur validité, ce service et son président étant dans l’impossibilité de fournir un « titre authentifiant la régularité d’une qualité officielle .

Il convient en outre de s’interroger sur la concentration des pouvoirs en une seule personne : Monsieur F. IDE, anti-arme proclamé, est à la fois le principal rédacteur de la nouvelle loi, l’autorité de recours, le président du Conseil consultatif  (article 36 de la loi du 08 juin 2006) et le rédacteur des textes d’application outre les circulaires « explicatives »…

§ 2. Le traitement du recours

La dernière phrase du second alinéa de l’article 30 précise que la décision rendue sur recours par le ministre de la Justice ou son délégué devra l’être dans les six mois de la réception de la requête. Aucune sanction n’étant prévue en cas de dépassement du délai, l’on peut en déduire qu’il s’agit d’un délai d’ordre dont le dépassement ne libère en aucun cas le ministre ou son délégué de leur obligation de statuer, mais qui ouvre par contre la possibilité au requérant d’invoquer l’article 14 § 3 des lois coordonnées sur le Conseil d’Etat pour mettre en demeure l’autorité administrative compétente de statuer sur son recours en cas de dépassement du délai raisonnable.

Rien n’est dit de la procédure d’examen du recours. Il y a donc lieu pour le ministre et son délégué de s’acquitter de la tâche qui leur est dévolue dans le respect des principes de bonne administration.

Toutefois, bien que le texte ne le précise pas, la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs trouve bien évidemment à s’appliquer ici, en telle manière que la décision rendue sur recours intenté sur base de l’article 30 de la loi du 08 juin 2006 devra être motivée en la forme.

§ 3. Les effets du recours.

Le pouvoir reconnu au ministre de la Justice et à son délégué, lorsqu’ils sont amenés à statuer sur le recours, introduit sur pied de l’article 30 de la loi du 08 juin 2006, est-il un pouvoir de réformation ? Le texte ne le précise pas. Nous savons que tant la jurisprudence que la doctrine admettent largement qu’en cas de silence des dispositions légales organisant le recours sur cette question, le recours administratif est un recours de réformation.

A la question soulevée par Monsieur Melchior WATHELET sur la manière, dont ce recours administratif allait se combiner avec le recours de droit commun, ouvert auprès du Conseil d’Etat, Madame la ministre de la Justice Laurette ONKELINX confirma l’application de la règle générale, selon laquelle un acte administratif ne peut être attaqué devant le Conseil d’Etat que lorsque toutes les voies de droit prévues ont été épuisées, en telle manière que l’acte soit devenu définitif.

§ 4. Le recours en cas d’absence de décision du gouverneur.

Le projet de loi qui avait été soumis à l’examen des parlementaires ne prévoyait la possibilité du recours devant le ministre de la Justice qu’à l’encontre d’une décision prise par le gouverneur « refusant, limitant, suspendant ou retirant un agrément, une autorisation, un permis ou un droit ». Rien n’était prévu en cas d’absence de décision du gouverneur dans le délai qui lui était imparti. Le texte se contentait de fixer un délai d’ordre de quatre mois, dans lequel il devait statuer sur les demandes lui adressées, telles qu’énumérées à l’article 31 de la loi, en prévoyant la possibilité de prolonger ce délai d’une période maximale de six mois.

Madame Laurette ONKELINX avait précisé à cet égard que cette décision de prolongation était elle-même constitutive d’un acte administratif susceptible de faire l’objet d’un recours. Elle précisa que, nonobstant le fait que le recours devant le ministre de la Justice ne soit pas ouvert au citoyen en cas d’absence de réaction du gouverneur dans le délai lui imparti pour ce faire, il n’en demeurait pas moins que cette situation ouvrait au requérant la possibilité de le mettre en demeure de prendre position. Si aucune suite ne devait être réservée à cette mise en demeure, le silence du gouverneur devrait être assimilé à un refus par omission susceptible d’être attaqué devant le Conseil d’Etat.

Monsieur Melchior WATHELET insista pour que le recours devant le ministre de la Justice soit également ouvert au citoyen en cas de silence du gouverneur, et ce dans le souci d’assurer à tous les demandeurs un même degré de juridiction supplémentaire. Monsieur Bart LAERMANS plaida également en faveur de cette modification : « le ministre de la Justice devrait être compétent pour statuer dans tous les cas – y compris dans le cas où le gouverneur s’abstient de prendre une décision. A défaut, les délais risquent d’être trop longs .Monsieur Melchior WATHELET présenta en ce sens un amendement (n° 41 – DOC 51 2263/002) qui fut favorablement accueilli, dans la mesure où le texte en projet fut effectivement modifié pour étendre la possibilité d’intenter le recours organisé devant le ministre de la Justice « en cas d’absence de décision du gouverneur dans les délais visés à l’article 31 ».

§ 5. Une exception : les décisions relatives à des demandes irrecevables – l’arrêt de la Cour
Constitutionnelle du 19 décembre 2007 (n°154/2007)

Les derniers mots du premier alinéa de l’article 30  prévoient une exception expresse au principe du recours devant le ministre de la Justice pour ce qui concerne les décisions concernant les demandes irrecevables.

Cette exception n’a bien entendu pas échappé à certains détracteurs de la loi et recours en annulation partielle du texte légal fut intenté devant la Cour Constitutionnelle contre cet article par un Sieur Willy FURNEMONT et l’ASBL « Ligue des Amateurs d’Armes ». Les requérants dénonçaient le caractère discriminatoire de l’exception contenue dans cet article, en ce qu’elle privait les citoyens dont la demande avait été jugée irrecevable par le gouverneur de la possibilité d’exercer un recours ouvert par ailleurs à tous ceux dont la demande avait été jugée recevable. Ils invoquaient la violation des articles 10, 11, 12, 14, 23 et 191 de la Constitution à l’appui de leur recours.

Ce dernier fut joint à six autres recours en annulation totale ou partielle intentés contre un ensemble de dispositions de la loi du 08 juin 2006 par divers requérants et la Cour Constitutionnelle se prononça sur l’ensemble de ces recours par un arrêt volumineux rendu en date du 19 décembre 2007 sous le numéro 154/2007, arrêt au terme duquel elle recevra les recours en annulation portant sur les articles 11, § 3, 9° et 29, § 1, al. 2, 1° de la loi, rejetant pour le surplus les autres recours, sous certaines réserves qui ne concernent pas l’article 30 alinéa 1.

En ce qui concerne cet article, la Cour rappellera le principe selon lequel « c’est au législateur qu’il appartient d’apprécier l’opportunité de créer un recours administratif contre une décision administrative, sans préjudice du recours en annulation devant le Conseil d’Etat », mais que, « lorsque le législateur estime nécessaire de créer un recours administratif, il ne peut toutefois en priver une catégorie de citoyens sans justification raisonnable ».

Quelles étaient les raisons pour lesquelles le législateur avait décidé de réserver le recours devant le ministre de la Justice uniquement aux citoyens dont la demande était recevable ? Ces raisons étaient-elles constitutives de « justifications raisonnables » ? La Cour répondra à ces questions par ces termes : « En créant un recours auprès du ministre de la Justice ou de son délégué contre les décisions du gouverneur prises dans le cadre de la loi sur les armes, le législateur a permis aux personnes intéressées de faire contrôler par le ministre de la Justice les motifs du refus, du retrait, de la suspension ou de la limitation de leurs droits. En décidant de ne pas soumettre au ministre les demandes irrecevables, le législateur a créé entre les personnes intéressées une différence de traitement qui est justifiée par le souci de ne pas submerger le ministre de la Justice par des recours contre des décisions qui se fondent sur les causes d’irrecevabilité prévues par la loi. »

La Cour parachèvera son raisonnement en rappelant que « cette mesure ne porte d’ailleurs pas atteinte aux droits des intéressés, qui peuvent introduire un recours en annulation devant le Conseil d’Etat contre la décision du gouverneur, sans devoir au préalable introduire un recours devant le ministre de la Justice.

La décision du gouverneur de considérer une demande comme irrecevable ne peut, dès lors, faire l’objet d’aucun recours, et cette différence de traitement parait totalement justifiée aux yeux de la Cour Constitutionnelle. Cette position ne nous parait pas sans conséquence, dans la mesure où si l’on considère qu’un gouverneur de Province ait pu faire mauvaise application des dispositions de la loi du 08 juin 2006 à l’égard d’un requérant en lui refusant l’autorisation, l’agrément, le permis ou le droit sollicité, et que de ce fait, il paraisse juste de permettre à ce citoyen de faire examiner sa demande par une autre autorité administrative, l’on ne peut écarter l’hypothèse que ce même gouverneur puisse aussi faire mauvaise application de l’article 5 de la loi, et déclarer irrecevable une demande qui ne devrait pas l’être. Le souci de ne pas submerger le ministre de la Justice pose question quant à un traitement non discriminatoire des citoyens.

Section 3. De quelques modifications apportées par la loi du 25 juillet 2008.

C’est une logique sécuritaire exacerbée par le meurtre raciste d’Anvers en mai 2006, davantage fondée sur un principe d’interdiction générale que de liberté contrôlée, qui présida à la rédaction de la loi du 08 juin 2006. Les travaux parlementaires qui l’ont précédée en témoignent largement, tant y est invoqué la menace du danger que représentent les armes

Cet argument de dangerosité paraît en soi fort discutable, d’autant que l’on sait que, loin d’écarter le « danger », la prohibition est un des moteurs du marché noir. Ainsi le législateur a été mêlé en même sac le tireur, l’amateur de belles armes, le collectionneur et le truand oubliant que celui-ci ne se fourni pas plus dans le marché officiel que le trafiquant de drogue ne va faire ses emplettes en pharmacie.

Ainsi, l’on pourrait fort brièvement résumer le régime juridique auquel le texte du 08 juin 2006 soumettait les armes à feu de la manière suivante : la détention d’armes est interdite, sauf pour les collectionneurs, les chasseurs et les tireurs, moyennant autorisation du gouverneur de Province pour autant que soient respectées les conditions applicables à ces différentes catégories de personnes intéressées. Le texte n’envisageait qu’une détention « active » des armes, l’autorisation prévue par le texte portant à la fois sur l’arme et les munitions y afférentes (dont le nombre était par ailleurs limité pour chaque catégorie ci-dessus énumérées). Rien n’était prévu pour les détenteurs « passifs » d’armes à feu, et c’est, notamment, le cas de l’héritier désireux de conserver l’arme ayant appartenu au de cujus, sans pour autant l’utiliser, qui posait le plus de problème. Au terme de la loi du 08 juin 2006, ce dernier n’avait qu’une possibilité : faire abandon de l’arme héritée.

Il fut remédié à cette situation créant de facto une expropriation sans dédommagement par la loi du 25 juillet 2008 modifiant la loi du 08 juin 2006 réglant des activités économiques et individuelles avec des armes qui, notamment, inséra dans le texte les articles numérotés 11/1 et 11/2 introduisant le concept de détention passive d’armes à feu.

L’article 11 de la loi du 08 juin 2006 établit l’obligation pour un particulier d’obtenir une autorisation du gouverneur de Province en vue de la détention d’une arme soumise à autorisation et des munitions y afférentes. Au terme de l’article 30 de la loi, la décision (ou l’absence de décision) rendue par le gouverneur sur telle demande d’autorisation, pour autant qu’elle soit recevable, est susceptible du recours organisé devant le ministre de la Justice.

La loi du 25 juillet 2008 a étendu l’obligation d’obtention d’une autorisation de détention « aux personnes désirant conserver dans leur patrimoine une arme qui avait fait l’objet d’une autorisation, ou pour laquelle une autorisation n’était pas requise avant l’entrée en vigueur de la présente loi » par l’ajout de l’article 11/1. Elle étend également cette obligation, à travers le nouvel article 11/2, à l’héritier « qui apporte la preuve qu’il a acquis dans son patrimoine une arme détenue légalement par la personne décédée », et qui souhaite obtenir autorisation de détention.

Nous relevons que l’article 30 de la loi prévoit que le recours devant le ministre de la Justice ou son délégué est ouvert contre les décisions du gouverneur refusant, limitant, etc sans pour autant restreindre cette voie de recours aux décisions rendues sur des demandes précisément énumérées. Il faudrait en déduire, qu’eu égard au caractère général du libellé de l’article 30, alinéa 1, le recours ouvert devant le ministre de la Justice le serait aussi pour les décisions rendues par le Gouverneur sur des demandes introduites sur base de dispositions postérieures à l’entrée en vigueur de la loi du 08 juin 2006. Cela ne nous paraît pas si évident, dans la mesure où les cas envisagés par les nouveaux articles 11/1 et 11/2 sont radicalement différents de ceux précédemment pris en compte, puisqu’il ne s’agit plus de détention active d’armes, mais bien passive.

A ce jour nous n’avons pas connaissance d’un recours introduit devant le ministre de la Justice ou son délégué dans le cadre de ces dispositions. Il nous semble que le texte gagnerait à clarifier cette question. Si le Gouverneur devait refuser une autorisation sollicitée sur base des articles 11/1 ou 11/2, et que le requérant intente un recours devant le ministre de la Justice pour s’entendre répondre après 6 mois que son recours est irrecevable, il aurait définitivement perdu la faculté d’intenter un recours en annulation devant le Conseil d’Etat contre la première décision, les délais pour ce faire étant écoulés. Par contre, s’il décidait de saisir immédiatement le Conseil d’Etat et s’entendait répondre que son recours est irrecevable, faute d’avoir préalablement exercé le recours administratif organisé par l’article 30 de la loi, il aurait également définitivement perdu la possibilité d’exercer ledit recours, les délais fixés étant dépassés.

Il est vrai qu’il ne s’agit pas du moindre ni de l’unique paradoxe de cette loi « clarificatrice » !

Un recours administratif organisé doit l’être avec minutie.

Tel n’est pas le cas à ce jour, et d’aucuns y voient l’expression d’une volonté délibérée ; autant de « pièges » dissuadent le citoyen de se perdre en procédure, et l’abandon de l’arme et de ses droits devient l’attitude courante. On ne peut s’empêcher de penser qu’il s’agit là d’un des buts de ce parcours du combattant au milieu d’une législation buissonneuse et illisible.

La publication d’un texte désignant officiellement le délégué compétent pour se prononcer sur les recours intentés sur base de l’article 30 de la loi du 08 juin 2006 parait élémentaire, et l’ajout de quelques mots précisant si le recours prévu à l’article 30 est ouvert à l’encontre des décisions rendues par le gouverneur sur base de dispositions de la loi postérieures à l’entrée en vigueur de cet article, parait nécessaire. C’est une question de sécurité juridique.

Enfin, un arrêt du Conseil d’Etat du 01 septembre 2011 (Numéro 214.912) vient à nouveau modifier les perspectives en distinguant le droit de propriété et le droit de détention.

Cet arrêt entraînera nécessairement des conséquences majeures quant à la situation des détenteurs d’armes qui n’ont pu ou voulu se mettre en règle avant la date butoire du 01 novembre 2008.

Ici encore la législation « Sur les armes » devra être modifiée.

Conclusions.

Comment tenter de s’y retrouver dans le méandre des législations successives paraissant parfois contradictoires ?

Comment assurer une réponse claire et précise à une question en la matière ?

Comment ne pas avoir le sentiment profond d’une insécurité juridique certaine et éviter de commettre une erreur en la matière ?

Si d’aucuns, avant la loi du 08 juin 2006, pouvaient se vanter de faire le tour de la question et de connaître relativement bien la législation en matière d’armes, très honnêtement, au jour d’aujourd’hui, cela parait relativement impossible.

Le législateur du 08 juin 2006 a répondu dans l’urgence et la rapidité à une situation politique par un texte mal ficelé, complexe et inapplicable. Il a tenté de récupérer la mayonnaise par le texte du 25 juillet 2008 en tenant compte pour partie d’une décision de la Cour Constitutionnelle.

Il eut été plus sage de remodeler intégralement le texte et de revenir à des catégories claires et objectives. La loi de 1991 était à cet égard un modèle du genre. Il suffisait de l’aménager. L’absence de méthode et la confrontation entre deux options politiques, l’une visant l’interdiction au total, l’autre visant une certaine tolérance réglementée en matière d’armes, ont fait que la loi au sens générique du terme est sincèrement illisible et incompréhensible.

Il faut espérer qu’à terme, un législateur courageux rédige en une vingtaine d’articles, un texte clair et précis qui permettra, enfin, aux citoyens normalement constitués, de savoir clairement ce qu’il peut faire et ne pas faire et dans quelles conditions.

L’avertissement des Anciens trouve ici toute sa force : « Summum ius, summa iniura ! »

 

Yves Demanet
Avocat