De quelques points de repère en matière de législation sur les armes.
Comment ne pas penser à Dantes et au frontispice des portes des Enfers, lorsque l’on tente de synthétiser le dernier état de la question relatif à la législation sur les armes ? Comment ne pas se souvenir de la leçon de Lao Tseu considérant que l’essence même de la Loi est de faire régner l’ordre et l’harmonie au sein du Peuple ?
Si le lecteur a la curiosité d’introduire une recherche informatique relative aux législations en matière d’armes depuis la loi de 1933, et s’il lui prend la curiosité de ne taper aucune autre précision que le mot « arme », il constatera comme moi que depuis l’avènement de la loi de 1933, pas moins de 1030 textes ont été publiés au Moniteur belge.
L’on se souviendra que la loi du 08 juin 2006 prise dans l’urgence, et la nécessité d’une réponse politique ensuite du double meurtre raciste d’Anvers, publiée le 09 juin 2006 dans la même urgence, avait entraîné un ensemble de remarques quant à son inapplicabilité et ses incohérences, au point que la Cour Constitutionnelle, saisie de 7 recours différents, avait prononcé en audience publique du 19 décembre 2007 , un arrêt comportant 126 pages annulant différentes dispositions et appelant manifestement à en modifier d’autres. Cet arrêt avait été publié par extrait au Moniteur en page 3612, le 23 janvier 2008, permettant ainsi à une loi du 23 novembre 2007 d’être publiée, le 31 décembre 2007, afin de proroger certains délais prévus dans la loi du 08 juin 2006 pour permettre au Législateur de tenir compte de la décision de la Cour Constitutionnelle.
Depuis cet arrêt, le Législateur a publié différents textes et particulièrement une loi du 25 juillet 2008 publiée au Moniteur belge, le 22 août 2008.
Ce texte a amené différentes modifications législatives subséquentes qui doivent, elles aussi, être considérées.
Pour la clarté de l’exposé, je tenterai de reprendre les différents textes point par point.
1. La Loi du 25 juillet 2008.
Le 22 août 2008, en page 44.142, est publiée la loi du 25 juillet 2008 modifiant la loi du 08 juin 2006 réglant des activités économiques et individuelles avec des armes.
Cette loi comporte 35 articles modifiant à peu près l’ensemble des 58 articles antérieurs.
L’article 2 de la loi du 08 juin 2006 comportait 21 définitions ; la loi du 25 juillet 2008 ajoute 5 définitions relatives à la notion de résidence, à la définition de pièces d’arme telles que canon, revolver et pistolet, ainsi qu’une définition de la notion d’arme à répétition.
Le lecteur sera attentif à la notion de résidence qui aura une implication tout à fait extraordinaire dans la loi relative à la chasse, ainsi que des conséquences quant au port et au transport d’armes de chasse dans le cadre de l’activité de chasse. J’y reviendrai ultérieurement.
Dans le cadre de la classification des armes, la nouvelle disposition interdit maintenant les lunettes de visée nocturnes (art. 3.15, 4ème petit tiret).
L’on se souviendra qu’antérieurement, il existait une controverse quant à l’interdiction des lunettes de visée nocturne si celles-ci étaient, soit à infrarouge, soit à procédé d’intensification de lumière. Cette controverse est maintenant terminée puisque l’ensemble de l’appareillage optique utilisable de nuit est catalogué dans les armes prohibées.
Le même article comporte une autre modification relative aux droits accordés par la loi au Ministre de la Justice et au Ministre de l’Intérieur de prohiber des armes dangereuses pour la sécurité publique, ainsi que leurs munitions.
L’ancien texte parlait d’armes ou de munitions « qui peuvent constituer un grave danger ». Le nouveau texte parle de« danger grave et nouveau… ». Faut-il voir dans la condition de « nouveauté », le souci de répondre à une évolution technologique ou la nouveauté résultera t’elle d’un événement et d’un usage « nouveau » d’un objet préexistant ???
Au même article, le paragraphe 3 en son point 2 impose comme condition au classement d’armes soumises à autorisation qui ne serait pas des armes à feu, la condition préalable de recueillir l’avis du conseil consultatif, tel qu’instauré par l’article 37 de la loi du 08 juin 2006. La composition et le mode de délibération de ce conseil consultatif, crée par l’article 37 de la loi du 08 juin 2006, a fait l’objet d’un arrêté royal du 25 janvier 2007 modifié par l’arrêté royal du 27 mai 2008 publié au Moniteur, le 29 Mai 2008.
L’article 4 de la loi du 08 juin 2006 dispose que toutes les armes à feu fabriquées en Belgique ou importées devaient nécessairement être inscrites dans un registre central des armes dans lequel, aux vœux de la loi « un numéro d’identification unique leur est attribué ». On se souviendra que le Registre Central des armes a été créé par l’arrêté royal du 20 septembre 1991 en son article 28.
La loi du 08 juin 2006 prévoyait que la date de l’entrée en vigueur de l’article 4 serait fixée par le Roi par arrêté délibéré au conseil des Ministres. La loi du 25 juillet 2008 prévoit cette fois que cet article entrera en vigueur, le 1er janvier 2010.
Cette disposition pose différents problèmes : qu’en sera-t-il des armes qualifiées comme telles qui ne comportent pas de numéro ? Qui sera chargé de frapper ce nouveau numéro ? Qu’en est-il encore des armes qui comportent déjà un numéro ; celui-ci sera-t-il enregistré comme tel ou un nouveau sera « sur-frappé » sur l’arme ?
L’article 5 de la loi du 08 juin 2006 connaît plusieurs modifications à considérer. Cet article traite en effet des conséquences de condamnations pénales quant à la recevabilité des demandes formulées par le condamné. L’on retiendra principalement que cet article est entré en vigueur le 1er septembre 2008. L’on retiendra également la modification portée au § 4, 2.b relative aux irrecevabilités quant aux condamnations antérieures dans le cadre de demandes introduites au titre de collectionneur ou de détenteur légal d’armes.
Ainsi, les articles 214, 274, 344, 345 et 415 du Code Pénal ont été retirés, tandis qu’ont été rajoutés les articles 136 bis à 140, 226, 246 à 249, 331 bis, 372 à 377, 417 ter à 417 quinquies, 442 ter, 488 bis, 491 à 505, ainsi que 528 à 532 bis et 538 à 541.
Les condamnations prononcées du chef de ces nouveaux articles, tels que repris, empêchent dès lors de considérer les demandes comme recevables.
La question est de savoir ce qu’il en advient des demandes introduites sous l’empire de la loi du 08 juin 2006 avant la publication de la loi du 25 juillet 2008, auquel il n’a pas encore été fait droit, de même que le sort de la situation de ceux qui, par hypothèse, auraient obtenu les autorisations nécessaires, mais seraient dans le cadre des dispositions de la loi nouvelle.
Le même article comporte encore des modifications aux paragraphes 4, point h et i, relatives aux condamnations prononcées ensuite d’infractions à la loi du 10 avril 1990 réglant la sécurité privée et particulière, ainsi qu’à la loi du 19 juillet 1991 organisant la profession de détective privé.
Un point k est ajouté dans la nouvelle disposition en ce que les condamnations, prononcées du chef des législations régionales ou communautaires relatives à la chasse et au tir sportif, interdisent maintenant de présenter une demande au sens de l’article 5.
Enfin, qu’en sera-t-il de l’effet d’une éventuelle amnistie ou d’une grâce ? Qu’aura comme conséquence, une requête en réhabilitation ? Devra-t-on tenir compte du certificat de bonne vie et mœurs ou du casier judiciaire ? Quid des conséquences de l’application de la loi de défense sociale ???
L’article 6 de la loi du 08 juin 2006 prévoyait un mécanisme d’autorisation pour tenue de musée ou de collection privée, lorsque le nombre d’armes est égal ou supérieur à 10. La nouvelle législation ramène ce chiffre à 5 armes à feu soumises à autorisation. Ces chiffres « 10 » et « 5 » font écho à l’ancienne législation relative au dépôt d’armes chez un particulier aux conditions déterminées par l’arrêté royal du 24 avril 1997 publié au Moniteur, le 16 Mai 1997.
Rappelons que cet article 6, tel que prévu par la loi du 08 juin 2006, entrait en vigueur le 09 janvier 2007, alors que la nouvelle limitation à 5 armes à feu entre en vigueur à partir du 1er septembre 2008.
Là encore, la question du régime transitoire n’a pas été rencontrée par la nouvelle législation.
L’article 7 relatif aux agréments qui devaient s’appliquer de par l’ancienne législation à la date du 09 janvier 2007, pour autant que les dispositions étaient nécessaires en application de l’article 6, est quant à lui entré en vigueur le, 1er septembre 2008.
L’article 8 relatif aux opérations avec des armes prohibées, tel que publié par la loi du 08 juin 2006, avait déjà été complété et modifié par la loi du 20 mars 2007 publiée au Moniteur belge, le 26 avril 2007. Cet article est entré en application le 1er septembre 2008.
L’article 11 de la Loi du 08 juin 2006 vise particulièrement le régime et les conditions de détention d’une arme à feu par un particulier.
L’on se souviendra que l’arrêt de la Cour Constitutionnelle dans son dispositif annulait « dans la loi du 08 juin 2006 réglant des activités économiques et individuelles avec des armes : l’art. 11, § 3, point 9 en ce qu’il ne mentionne pas comme motif légitime la conservation d’une arme dans un patrimoine, lorsque la demande d’autorisation de détention concerne une arme soumise à autorisation à l’exclusion des munitions, pour laquelle une autorisation de détention a été délivrée ou pour laquelle une autorisation de détention n’était pas requise (…) »
Le Législateur de ce 25 juillet 2008 tire une partie des conséquences de cet arrêt et apporte plusieurs modifications à l’ancien article 11 de la loi du 08 juin 2006.
Ainsi, on retiendra qu’est maintenant considéré comme motif légitime d’acquisition et de détention d’une arme, l’exercice non plus d’une profession présentant des risques particuliers, mais bien d’une activité présentant des risques particuliers ou nécessitant la détention d’une arme à feu ( article 11, point 9, c) . La notion « d’activité » me semble plus large que le critère purement professionnel, mais on pourrait tout autant considérer que seule une ou plusieurs « activité(s) » particulière(s) de l’exercice d’une profession pourrai(en)t former la condition, en manière telle que la condition contingenterait l’autorisation à l’activité uniquement. Sur les conditions d’acquisition, de port, de détention d’armes par les professionnels , on s’en réfèrera, notamment, à la circulaire GPI 62 du 14 février 2008 relative à l’armement de la police intégrée structurée à deux niveaux, publié le 29 février 2008 en page 12615 du Moniteur, et l’arrêté royal du 09 octobre 2008, publié le 22 octobre 2008, relatif aux armes utilisées par les entreprises, organismes et personnes visées par la loi du 10 avril 1990 réglementant la sécurité privée et particulière.
Le point f de ce point 9 comportait comme motif légitime la participation à des activités historiques, folkloriques, culturelles ou scientifiques. On se souviendra du véritable tollé qu’avait entraîné la lecture de l’article 43 de la Loi du 08 juin 2006 modifiant l’article 1 bis de la Loi du 29 juillet 1934 relatif à l’interdiction des milices privées. Curieusement, cet article 43 n’est pas modifié par la Loi du 25 juillet 2008.
La nouvelle législation renvoie cependant aux conditions de recevabilité, telles qu’exigées dans les points 1 à 4, 6 et 8 de l’article 11, ce qui semble avoir été oublié dans le cadre de la loi du 08 juin 2006.
L’on retiendra encore, en même disposition, les assouplissements autorisés aux titulaires du permis de chasse, tels que prévus au point 4 du paragraphe 4 du même article, ainsi que la suppression de l’examen médical obligatoire au bénéfice de certains tireurs. Non seulement, on évite le double examen (une fois par an pour la licence et une fois pour l’autorisation), mais on répond ainsi à l’Ordre des Médecins qui s’était insurgé sur le transfert de responsabilité puisqu’il leur était quasiment demandé de garantir que le demandeur ne présentait aucun risque d’ordre psychologique, notamment… L’Ordre avait d’ailleurs répondu à cet exigence en recommandant d’inscrire sur le certificat ad hoc « A ce jour et pour l’instant ». Sur l’intervention des médecins, on lira l’arrêté ministériel du 16 octobre 2008 publié au Moniteur le 20 octobre 2008 « Portant reconnaissance des médecins compétents pour la délivrance d’une attestation visée à l’article 14, soit les conditions de port d’arme « de la loi sur les armes », dont la traduction en langue allemande a été publiée au Moniteur, le 12 novembre 2008.
La nouvelle loi introduit un article 11/1 qui répond à tout le moins partiellement à l’arrêt de la Cour Constitutionnelle, en ce que cette nouvelle disposition permet maintenant à toute personne de conserver au titre de valeur patrimoniale une arme, à condition toutefois que cette arme ne nécessitait pas d’autorisation avant l’entrée en vigueur de la loi du 25 juillet 2008, d’une part et d’autre part, en considérant l’exclusion à l’accès aux munitions.
L’article 11.2, nouveau également, vise le cas particulier de l’héritier (§ 2), ainsi que du tireur sportif ou du chasseur qui perdrait cette qualité (§ 3).
L’article 12 fait exception aux conditions de l’article 11 nouveau et vise particulièrement les armes de chasse.
Le point 1 est modifié, en ce que ce ne sont plus « des armes à feu longues conçues pour la chasse, ainsi que les munitions y afférentes… », mais bien « des armes longues, autorisées à cette fin, là où le permis de chasse est valable, ainsi que les munitions y afférentes ».
Cet article posera un énorme problème au chasseur belge qui devra articuler les législations décrétales, région par région, et la nouvelle disposition, puisque le droit de la chasse et les armes autorisées pour pratiquer celle-ci, relèvent de la compétence des régions.
En ce sens, on retiendra l’arrêté du Gouvernement Flamand modifiant certaines réglementations relatives à la chasse du 04 juillet 2008 publié le 29 août 2008 en page 45.254 du Moniteur belge qui, en son article 7,2 visait l’usage d’un fusil de calibre de 22 pouces, soit 55,88 mm de diamètre. Cette erreur avait été corrigée par l’arrêté du même Gouvernement Flamand du 05 septembre 2008, cette fois publié en page 46.533 du Moniteur belge.
Cette erreur corrigée montre à suffisance que les discordances de « législations » entre régions peuvent amener le fait qu’une arme en Belgique soit de chasse ou pas, et dès lors visée par l’article 12 nouveau dans un sens ou dans l’autre en fonction de la région où l’on postule son achat, ou bien encore où l’on réside. Que se passe-t-il encore en ce qui concerne le transport et le motif légitime qui pourrait être admis dans une région et pas l’autre ?
Qu’en est-il d’armes de chasse interdites en Belgique et obligatoires en Afrique ou en Asie dans les safaris ? Sont-elles encore des « armes de chasse » ???
L’article 12 nouveau comporte encore en son point 5, une réponse positive à une demande formulée par le milieu des collectionneurs, en ce que les particuliers majeurs qui manipulent « au maximum une fois par an » une arme soumise à autorisation sur un champ de tir reconnu, font exception à l’article 11 et à ses conditions. Toute la question évidement repose quant au contrôle de la condition de fréquence.
La nouvelle loi introduit encore un article 12/1 autorisant le prêt d’arme à feu, selon un ensemble de conditions énumérées entre titulaires de permis de chasse ou de licence de tireur sportif, voir d’une autorisation de détention d’armes à feu plus générale.
On retiendra à cet égard particulièrement la condition du point 4 du nouvel article qui exige un accord écrit et signé par le prêteur, ainsi qu’en annexe une copie du document attestant de l’existence du permis de chasse ou de la licence de tireur ou de la détention sauf, dit la loi, si le prêteur est présent. La notion de « présence » s’entend-elle par « à côté » ou dans le même lieu ???
L’article 13 connaît différentes modifications, en ce qu’il précise, notamment, donner nouveau pouvoir au Ministre de la Justice d’agir concomitamment au Gouverneur de la Province compétent pour la résidence de la personne visée.
L’article 15 accordait anciennement une présomption de permis de port d’arme liée à l’existence d’un motif légitime pour les personnes visées par l’article 12, ancienne formule.
Cet article est réécrit et accorde toujours une autorisation de port d’armes, mais uniquement dans le cadre de la pratique de l’activité, soit de chasse, soit de tir aux personnes visées au nouvel article 11, § 3 et au nouvel article 12.
La condition de motif légitime est évidemment maintenue.
L’article 19 de la loi du 08 juin 2006 visait les interdictions et connaît lui aussi différentes modifications.
Ainsi, l’interdiction de vente des armes par Internet aux particuliers est évidemment maintenue, mais il est expressément précisé que cette interdiction est également d’application à toutes les ventes entre particuliers par correspondance, et qu’il est également interdit d’organiser des ventes à distance dans le même contexte.
Une autre modification tout à fait fondamentale est apportée par la loi du 25 juillet 2008 dans le point 5 de ce nouvel article 19, en ce que la dernière partie de l’interdiction se voit amputée de par la loi du 25 juillet 2008 de l’interdiction de vente des armes en bourse aux armes.
En effet, les derniers mots de cet alinéa, soit « par des armuriers et des collectionneurs agréés » ont été supprimés, en manière telle qu’à nouveau les particuliers retrouvent l’autorisation de vendre en bourse aux armes.
Il est à noter que de par les nouvelles dispositions de la loi du 08 juin 206, les bourses aux armes sont soumises à l’autorisation préalable du Ministère de la Justice.
Les ventes en bourse aux armes ne sont évidemment pas exclusives du respect de l’ensemble de la Législation, et, notamment, des conditions d’acquisition des armes.
On notera que par principe, les armes de panoplie sont en vente libre, ce qui malheureusement risque de ne pas perdurer longtemps, puisqu’il existe des projets de réforme des textes à cet égard avec, notamment, pour objectif de soumettre les armes de panoplie au mécanisme de la déclaration, tel qu’on le connaissait antérieurement de par les dispositions de la loi de 1933, telles que modifiées par la loi de 1991.
Ainsi, à suivre cette idée : toutes les armes, en ce compris les armes de panoplie, seraient dans un futur proche contrôlable, et donc soumises au registre central des armes.
Lorsque l’on combine cette idée de nouvelle législation avec l’article 4, tel qu’il sera appliqué en 2010, l’on perçoit nettement la volonté du Législateur d’opérer un contrôle global et total sur tout ce qui pourrait être qualifié d’arme en Belgique.
L’article 21 vise les conditions du transport des armes à feu ; il connaît une modification en son point 1, 2, en ce que la nouvelle législation autorise maintenant expressément le transport d’armes de panoplie, ce qui antérieurement allait de soi, puisqu’il s’agissait d’armes d’acquisition, de détention et de vente libre… Pourquoi, dès lors, cette disposition si ce n’est par l’existence d’une bien vilaine arrière-pensée ?
Cet article 21 pose un autre problème aux chasseurs.
En effet, à lire le texte, seul le transport entre le lieu de détention de l’arme et le lieu d’exercice de l’activité, que ce soit de la chasse ou du tir, est autorisé à l’exception du motif légitime de se rendre chez un armurier.
Or, cela suppose nécessairement que le chasseur transporte son arme en temps continu de son lieu de domicile au lieu de chasse et retour. Cela suppose par exemple, qu’il ne prenne pas une nuit d’hôtel ou rende visite à une tierce personne, alors qu’il transporte ses armes en vue d’une partie de chasse.
Faut-il aller jusqu’au bout de l’expression de l’article et considérer que le chasseur qui transporterait ses armes n’est pas autorisé à faire le plein de son véhicule ???
Faut-il considérer que le tireur, après une éventuelle compétition, n’est pas autorisé à garder les armes dans son coffre et à aller au restaurant ???
A suivre strictement la loi, les réponses semblent être malheureusement positives. Sans doute verra t’on apparaître dans la jurisprudence, à côté de la notion du « chemin du travail » cher aux Tribunaux du même nom, la notion du « chemin du tireur et/ou chasseurs » propre cette fois aux Tribunaux Correctionnels.
L’article 23 alinéa 1 relatif aux dispositions pénales de la loi sur les armes connaît également une modification en ce que celui-ci est étendu à l’énumération visée dans l’article 47 de la loi du 08 juin 2006.
L’on se souviendra que cet article 47 abrogeait les anciennes dispositions sous réserve du maintien de l’application des arrêtés d’exécution de la loi de 1933, telle que modifiée en 1991 jusqu’à leur replacement à la condition toutefois qu’ils ne soient pas toutefois en contradiction avec la nouvelle législation.
L’article 24, alinéa 2 de la loi répond au souci des musées publics qui s’insurgeaient de voir des armes de haute valeur et de grand intérêt historique faire l’objet d’une disposition ordonnant leur destruction systématique.
Ainsi, l’alinéa 6 in fine de l’article 23 a été modifié, en ce que les armes qui seront saisies et réservées aux musées ne doivent plus être rendues inaptes au tir avant d’être remise.
Cette modification correspondait également à une demande du banc d’épreuve qui était saturé de demandes de démilitarisation et ne pouvait en temps raisonnable y répondre valablement.
L’article 27 comporte un ensemble de dérogations à la législation qui intéressent spécifiquement les commandes d’armes et de munitions de l’Etat et des administrations publiques.
Cet article connaît une modification également, en ce que le paragraphe 4 autorise maintenant les collectionneurs agréés à pouvoir détenir, acquérir ou importer, pour des collections privées, des armes à feu tout en se conformant aux dispositions réglementaires prévues.
La nouvelle disposition de la deuxième partie du paragraphe 4 semble même autoriser l’obtention d’un agrément de collectionneur pour du matériel qui en principe est réservé à l’Etat et à ses services publics.
En ce cas, par dérogation à l’article 6, § 1 de la loi du 08 juin 2006, lesdits objets sont assimilés à des armes à feu.
L’article 28 est relatif aux mesures de contrôle de la loi ; il est à noter que conformément aux recommandations précises de la Cour Constitutionnelle, le paragraphe 2 a été modifié, ne permettant plus aux policiers de procéder à une saisie administrative provisoire des armes et munitions. L’intervention du Juge semble retrouver toute sa place.
En son alinéa 2 du paragraphe 2, le délai accordé au Gouverneur, pour répondre à la demande d’autorisation, est porté de un mois à trois mois une fois le récépissé délivré. Il est à noter qu’à défaut de réponse valable, les objets saisis sont libérés, ainsi que les agréments, permis et autres autorisations restitués, mais le législateur a prévu cependant que cette remise s’opérait sans préjudice de toute saisie judiciaire.
Le paragraphe 2 comporte maintenant un troisième alinéa, en ce que la saisie et la décision du Gouverneur peuvent également se rapporter à des armes à feu en vente libre sous la condition que ces armes de panoplie tirent des projectiles.
L’on imagine, dès lors, qu’il s’agit de toute arme à feu pouvant tirer des projectiles, ce qui exclurait les armes démilitarisées qui sont aussi par définition des armes de panoplies.
D’aucuns trouvent là l’expression de la volonté du législateur du 25 juillet 2008 d’incorporer les armes de panoplie à un régime général global.
L’article 29 vise le constat des infractions à la législation sur les armes.
L’on se souviendra que la Cour Constitutionnelle avait annulé l’article 29 § 1, alinéa 2, point 1. L’ancienne disposition permettait à toute autorité policière, sans le contrôle d’un Magistrat et à fortiori d’un Juge d’Instruction, de perquisitionner de jour comme de nuit et en quelque lieu que ce soit (article 29, § 1,2°, 1). La Cour Constitutionnelle avait stigmatisé cette dérogation au droit pénal commun comme disproportionnée (Voir Arrêt de la Cour, numéro 77.6 et 77.5). Cette disposition a été abrogée. Pour le surplus, la nouvelle législation s’est contentée de remplacer la compétence de police locale attribuée in fine par l’article à la police fédérale. Mais le Législateur a pris parallèlement à la Loi de 2006, d’autres mesures pour augmenter les moyens judiciaires de contrôle et d’enquête. Ainsi, le moniteur a publié le 16 juin 2006, une loi non autrement intitulée que « Loi portant des dispositions diverses ». Cette loi comporte un article 90 ter qui précise :
« Lorsque les nécessités de l’instruction l’exigent, le juge d’instruction peut, à titre exceptionnel, écouter, prendre connaissance et enregistrer, pendant leur transmission, des communications ou des télécommunications privées, s’il existe des indices sérieux que le fait dont il est saisi constitue une infraction visée par l’une des dispositions énumérées au § 2, et si les autres moyens d’investigation ne suffisent pas à la manifestation de la vérité. (En vue de permettre l’écoute, la prise de connaissance ou l’enregistrement direct de communications ou télécommunications privées à l’aide de moyens techniques, le juge d’instruction peut également à l’insu ou sans le consentement de l’occupant, du propriétaire ou de ses ayants droit, ordonner la pénétration, ( à tout moment), dans un domicile ou dans un lieu privé).
La mesure de surveillance ne peut être ordonnée qu’à l’égard soit de personnes soupçonnées, sur la base d’indices précis, d’avoir commis l’infraction, soit à l’égard des moyens de communication ou de télécommunication régulièrement utilisés par un suspect, soit à l’égard des lieux présumés fréquentés par celui-ci. Elle peut l’être également à l’égard de personnes présumées, sur la base de faits précis, être en communication régulière avec un suspect ».
Or le § 2, point 16 étend cette disposition importante à la Loi sur les armes : « 16° à l’article 10 de la loi du 5 août 1991 relative à l’importation, à l’exportation et au transit d’armes, de munitions et de matériel devant servir spécialement à un usage militaire et de la technologie y afférente ».
On notera que ce pouvoir est donné au procureur du Roi en cas de flagrant délit (article 90 ter, §5) et aux autorités étrangères compétentes (article 93 ter, §6).
Au titre de la répression pénale, on notera l’article 107, 3° du nouveau Code Forestier, selon le décret du 15 juillet 2008 publié au Moniteur, le 12 septembre 2008 en page 47631. Cette disposition prévoit que les peines stipulées dans le code forestier seront doublées « 3° Lorsque le contrevenant est porteur d’un outil de coupe, d’extraction ou d’une arme ».
L’article 31 vise la compétence du Gouverneur quant aux agréments conformément aux articles 5, 6, 20 et 21 de la loi.
En ce qui concerne les demandes d’autorisation de permis visés aux articles 11, 14 et 17, celui-ci doit se prononcer dans les quatre mois de la réception de la demande. Une nouvelle disposition s’insère en cet article en ce sens que la prolongation ne peut plus être accordée qu’une seule fois par demande et que sa durée ne peut excéder 6 mois.
L’article 32 de la loi du 08 juin 2006 connaît de profondes modifications.
L’on se souviendra que la loi du 08 juin 2006 permettait une validité maximale de 7 ans aux agréments visés par l’article 5, et prévoyait un ensemble de conditions quant au renouvellement.
Au regard des dispositions de la Cour Constitutionnelle, le Législateur du 25 juillet 2008 précise que les agréments et autorisations sont délivrés pour une durée indéterminée à l’exception du port d’armes qui connaît sa période de renouvellement obligatoire.
Le législateur cependant dispose qu’une fois tous les 5 ans, « le Gouverneur prend l’initiative de vérifier si tous les titulaires d’agréments et d’autorisations visés par la présente loi, à l’exception des permis de port d’armes, respectent la loi et satisfont encore aux conditions pour la délivrance de ces autorisations et agréments ».
Il est expressément prévu que le Gouverneur interroge à cet effet la Police locale et éventuellement le Ministère Public.
In fine, les nouvelles dispositions précisent que « s’il apparaît que la détention de l’arme peut porter atteinte à l’intégrité physique de personnes ou que le motif légitime invoqué […] n’existe plus, le Gouverneur peut limiter, suspendre ou retirer l’autorisation par décision motivée… »
L’article 34 est abrogé ; cet article prévoyait que le Roi était autorisé à étendre en tout ou partie aux armes autres que les armes à feu, les dispositions des articles principaux de la loi du 08 juin 2006.
L’on se souviendra qu’en ce qui concerne les armes de panoplie, d’aucun au Ministère de la Justice avaient la ferme intention d’user et d’abuser des arrêtés royaux pour étendre au maximum aux armes de panoplie, les dispositions extrêmement restrictives de la loi du 08 juin 2006.
Le législateur du 25 juillet 2008 a écarté cette possibilité qu’il a cependant rouverte en permettant l’assimilation des armes de panoplie aux armes soumises à autorisation, tel que précisé ci-avant.
En réalité, deux conceptions s’affrontent actuellement au Ministère de la Justice, à savoir d’une part, l’idée que les armes de panoplie doivent être de commerce libre, car ne présentant aucun danger réel, tandis qu’une autre conception considère que toute arme doit être l’objet d’un règlement, en manière telle que par le biais d’une éventuelle soumission des armes de panoplie au régime de la déclaration, l’on retrouverait les conditions d’application de la loi du 08 juin 2006, même en tenant compte de la suppression de l’article 34 de par la loi du 25 juillet 2008.
L’article 36 vise le conseil consultatif des armes et le service fédéral des armes.
Il s’agit de deux services qui dépendent du Ministère de la Justice, et ont des missions spécifiques.
Ces services avaient pour objet d’être un lieu d’expression des différentes sensibilités, mais de plus en plus se révèle comme une antichambre de textes soumis à l’appréciation du Ministre, en manière telle que leur composition n’est pas innocente.
Plusieurs voies se sont déjà exprimées pour dire clairement que, notamment, le conseil consultatif était l’expression de certaines sensibilités non-majoritaires dans le domaine des chasseurs, des tireurs et des collectionneurs.
Sa validité, en qualité de représentant des différentes sensibilités des amateurs d’armes, est donc régulièrement mise en doute.
C’est dans cette antichambre du Ministère de la Justice que l’on trouve, notamment, l’idée de faire « passer » les armes de panoplie du « commerce libre » au statut d’objets soumis à la loi du 08 juin 2006.
L’article 44 a été modifié, en ce que le dernier délai d’application de la loi prévue au 30 juin 2007 avait été reporté au 31 octobre 2008. Cet article connaît une autre modification, en ce qu’il est maintenant prévu un régime transitoire sur la validité des autorisations antérieures, puisque l’alinéa 2 du paragraphe 1 précise « dans l’attente de la décision de délivrer ou non l’autorisation conformément aux dispositions de la présente loi, la demande d’autorisation vaut autorisation provisoire ».
Il convient donc pratiquement d’être attentif à sauvegarder pour pouvoir justifier de la légitimité de la détention, non seulement l’ancienne autorisation, mais également la demande de la délivrance d’une nouvelle, selon les nouvelles dispositions.
Au paragraphe 2 du même article, il existe la même modification de l’application de la loi dans le temps, c’est-à-dire à la date du 31 octobre 2008.
S’ajoutent deux autres alinéas visant au renouvellement des autorisations obtenues antérieurement à la loi du 08 juin 2006 pour les chasseurs et tireurs sportifs.
Le même mécanisme est prévu, à savoir l’ancienne autorisation et la demande de renouvellement valant autorisation provisoire.
L’article 47 connaît deux modifications, à savoir que d’une part, les anciennes dispositions de la loi de 1933 sont maintenant, semble-t-il, toutes abrogées, et qu’autre part, le terme de validité de 5 ans antérieurement prévu pour les agréments est supprimé.
L’article 49 vise l’entrée en vigueur de la nouvelle loi du 25 juillet 2008, soit au 1er septembre 2008, à l’exception de l’article 4, comme indiqué ci-avant, qui n’entrera en vigueur que le 1er janvier 2010.
La nouvelle disposition du 25 juillet 2008 modifie encore les droits et redevances relatifs à l’obtention des autorisations et agréments. En application de la loi du 08 juin 2006, le Législateur avait établi par sa loi-programme du 27 décembre 2006, l’article 352 fixant taxes et redevances.
Ces droits et redevances avaient été lourdement critiqués par les milieux des collectionneurs et amateurs d’armes, puisqu’ils rendaient extrêmement cher la possession d’aucune arme. Ceux-ci sont maintenant redéfinis et semblent plus acceptables. En ce sens, la Cour Constitutionnelle avait été saisie de différents recours et s’est prononcée par l’arrêt du 19 mars 2008 (numéro de rôle 4248), publié le 02 avril 2008 au Moniteur. Cet arrêt rejetait les recours, mais la condamnation de l’expropriation par l’arrêt du 19 décembre 2007 devait là encore être rencontrée, en manière telle que la loi du 25 juillet 2008 introduit un système de droits et redevances forfaitaire et limité.
Au terme de cet exposé rapide, il convient peut-être d’établir une synthèse un peu plus claire.
Synthèse.
La loi du 25 juillet 2008 modifiant la législation du 08 juin 2006 peut être grossièrement résumée en quatre points.
Premièrement, la nouvelle législation permet une détention qualifiée de passive, c’est-à-dire sans munitions aux personnes qui se voyaient privées du droit d’obtenir une autorisation de détention à raison du fait qu’elles n’étaient pas tireurs ou chasseurs. Ainsi, les personnes qui avaient une arme sous une autorisation valable avant la loi de 2006, les personnes qui ont hérité d’une arme détenue légalement, ainsi que les chasseurs ou les tireurs sportifs qui abandonnent leurs pratiques, peuvent maintenant conserver l’arme sans avoir accès aux munitions.
A cet égard, comment combiner cette interdiction d’accès aux munitions avec le fait que l’article 12, 5° de la nouvelle loi du 25 juillet 2008 autorise expressément l’usage d’une arme détenue dans ces conditions « une fois par an » ???
Deuxièmement, l’autorisation de détention d’armes devient à durée indéterminée, sous la réserve de ce qui est précisé à l’alinéa 2 de l’article 32, en ce que le Gouverneur prend l’initiative de vérifier tous les 5 ans les conditions propres à la loi du 08 juin 2006. La procédure de demande d’autorisation est accélérée, puisque le Gouverneur se voit accorder un délai maximal de 4 mois.
Troisièmement, les chasseurs et les tireurs sportifs se voient bénéficier d’un ensemble d’aménagements tout à fait favorables. L’on notera la disparition de l’attestation médicale et de l’épreuve théorique et pratique, la possibilité du prêt d’armes, la détermination des conditions du port d’armes au lieu d’exercice de leur activité et la possibilité de conserver les armes sans munitions en cas d’arrêt d’activité.
Quatrièmement, les collectionneurs et les musées se voient également gratifiés de modifications tout à fait favorables. La limitation des droits et redevances est un élément tout à fait apprécié tandis que le fait de pouvoir obtenir un agrément de collectionneur à partir de 5 armes et non de 10 permettra d’éviter les droits relatifs aux 5 dernières armes. L’accès aux bourses aux armes est enfin rendu aux amateurs et non plus réservé aux professionnels.
Il faudra cependant être particulièrement attentif, pour les motifs invoqués ci-avant, à l’interprétation restrictive qui semble, par le biais des arrêtés royaux et des arrêtés d’application vouloir à nouveau contrer la portée de l’arrêt de la Cour Constitutionnelle d’une part et des modifications de la loi du 25 juillet 2008 d’autre part.
Je termine en rendant particulièrement attentif le lecteur à la prise en compte de l’arrêté du 9 juillet 2007.
2. L’arrêté royal du 09 juillet 2007.
Le 2 août 2007 a été publié au Moniteur Belge en page 40.731 l’arrêté royal du 09 juillet 2007 exécutant certaines dispositions de la loi du 9 juin 2006 réglant des activités économiques et individuelles avec des armes.
Cet arrêté royal a été corrigé par une publication au Moniteur Belge faite le 4 avril 2008 en page 18.282 et comportant la présentation d’un tableau.
Le lecteur averti a déjà compris qu’il s’agissait du listing des armes de panoplie par définition en vente libre.
L’on se souviendra que le genre « armes de panoplie » est composé de différents sous-ensembles dans lesquels on trouve les armes démilitarisées et certifiées comme telles par le Banc d’Epreuve de Liège, notamment, les armes blanches et les armes à feu répondant à certaines conditions.
Pour faire simple, le 4 avril 2008 est publié au Moniteur en page 18.282 un listing d’armes à feu qui sont toutes considérées comme armes de panoplie et dès lors en vente libre sous réserve cependant des interdictions de la loi du 08 juin 2006 comme le commerce par internet.
Il s’agit donc d’armes à feu non démilitarisées.
Elles sont simplement considérées comme d’un intérêt historique, voir esthétique d’une part et d’autre part, sans capacité de représenter un réel danger social.
Ce sont par essence, des armes de collection.
Le législateur, conformément aux dispositions de la loi du 08 juin 2006 a donc établi un tableau exhaustif des armes à feu dites de panoplie. On y trouve les fusils et les armes de poing.
Ces armes représentent souvent une valeur patrimoniale tout à fait considérable. Il est heureux que le législateur ait empêché que les particuliers aient à s’en dessaisir ou à les faire « massacrer » par le Banc d’Epreuve pour obtenir un certificat de démilitarisation.
Ainsi le législateur a-t-il répondu aux demandes des collectionneurs. Il est à espérer que cette liste sera réactualisée en considérant les demandes des collectionneurs.
De lege ferenda, d’aucuns auraient souhaité voir des critères objectifs retenus par le législateur. Ainsi, on aurait pu considérer comme armes à feu de panoplie, toutes les armes antérieures à 1945, à l’exception des armes full auto. On aurait également pu retenir toutes armes construites de plus de 50 ans…
Il aurait aussi été opportun de régler clairement le sort des armes démilitarisées et, notamment, la question de la validité en droit interne, des poinçons de démilitarisation d’autres pays alors que les autres poinçons sont déjà reconnus par la Commission Internationale Permanente pour l’Epreuve des Armes à feu, selon la Convention du 1er juillet 1969.
On aurait pu s’inspirer encore de l’article 1 §2 de l’arrêté royal du 18 novembre 1996 publié le 20 décembre 1996 relatif au classement des armes dites d’alarme, selon l’ancienne loi de 1991 ; qui dispose : « La procédure d’homologation est décrite en annexe du présent arrêté s’il est établi, au moyen des documents nécessaires délivrés par un organisme autorisé, qu’un modèle d’arme a subi des essais d’homologation de classification équivalente dans un autre pays membre de l’E.E.E., ce modèle d’arme est considéré comme satisfaisant aux spécifications techniques fixées par le présent arrêté ».
A l’heure de l’Europe, le souci d’une certaine uniformisation n’eût pas été mal venu d’autant que l’effort de la carte européenne de tireur est déjà réalisé…
3. Les arrêtés royaux du 16 octobre 2008.
Le 20 octobre 2008 sont publiés au Moniteur Belge, trois arrêtés royaux complétant, appliquant et modifiant les anciennes dispositions en ce compris les dispositions prévues par la loi du 25 juillet 2008.
Je dis volontairement « modifiant » commettant ainsi une hérésie juridique mais que l’on me permette de dire que ce n’est pas moi qui ai commencé !
En ce sens certaines dispositions de ces arrêtés royaux me semblent être plus restrictives que la loi du 25 juillet 2008 faisant écho ainsi à un certain mouvement évoqué ci-avant relatif à un retour plus sévère et plus strict de la norme en matière d’armes et tentant de gommer les effets des modifications de la loi du 25 juillet 2008.
A. Le premier arrêté royal daté du 16 octobre 2008 est relatif au statut de l’armurier.
Cet arrêté royal peut être analysé en ce qu’il comporte deux volets bien distincts.
Le premier volet est relatif à l’obtention de l’agrément d’armurier et vise les conditions et les examens propres à cette qualité.
Ainsi, le chapitre 1 précise que tout candidat armurier doit joindre à sa demande une attestation de réussite de l’examen d’aptitude professionnelle tandis que le chapitre 2 encadre les conditions d’examen de ladite aptitude professionnelle. On y trouvera, notamment, en son article 4 la composition du jury d’examen qui comportera, notamment, la présence du Directeur du banc d’Epreuve ou de son délégué ainsi qu’un fonctionnaire de police ayant des connaissances spécifiques.
Comme nous sommes en Belgique, le point 4 de l’article 4 prévoit un représentant francophone et un représentant néerlandophone ; on n’a pas prévu de représentant germanophone.
On notera, res curiosa, que la matière, ses conditions ne sont toujours pas précisés ! Par contre, il y aura des épreuves techniques, théoriques et…déontologiques (article 3) et la composition du jury est arrêtée (article 4).
Le chapitre 3 du même arrêté royal instaure en Belgique un Code de Déontologie de l’armurier. Ce Code de Déontologie comporte les obligations professionnelles de l’armurier (article 10), la responsabilité envers la société (articles 11 et 12), les modalités techniques d’exercice (articles 13 et 14), la responsabilité de l’armurier (articles 17 et 18) et enfin les incompatibilités (article 19).
Il est à noter que cet arrêté royal entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur Belge, soit le 20 octobre 2008.
L’on notera au titre des obligations déontologiques de l’armurier que celui-ci et son personnel sont « tenus de fournir aux autorités de surveillance tous les renseignements nécessaires à un contrôle approprié » (art. 12). La notion de contrôle est évidement différente de la notion d’enquête et fait sans doute référence aux dispositions de la loi du 25 juillet 2008 relatives au contrôle que le Gouverneur peut exercer tous les 5 ans. Mais qui réellement peut opérer ce contrôle, Est-ce à l’initiative autonomique de la Police fédérale, faut-il une apostille d’un Magistrat, Est-ce purement administratif ??? Quel est l’étendue de ce contrôle et est-il assimilable à une visite domiciliaire consentie ? Peut-on le refuser ? Un PV sera-t-il rédigé ?
Ce contrôle n’est cependant pas autrement explicité, en manière telle que l’on peut imaginer que l’obligation de répondre à toute demande d’une autorité « de surveillance » est justifiée ontologiquement par la simple expression d’un contrôle en cours.
Au titre de la responsabilité de l’armurier, on notera l’interdiction pour un armurier de répondre à une demande d’un tiers qui rechercherait un avantage illicite ou immoral, ou qui veut abuser de ses services, selon l’expression de l’article 17.
Si l’on peut comprendre la définition d’un acte illégal voir illicite, l’arrêté royal reste muet quant à la définition « d’un avantage immoral ». On se perd en conjonctures à déterminer ce qu’est un acte immoral distinct des interdictions du Code Pénal…
L’article 19 dispose en son alinéa 2 que l’armurier « s’abstient de tout contact avec des personnes, dont il sait, ou dont il est de notoriété publique qu’elles fréquentent des milieux ne respectant pas les principes de la démocratie, tels qu’énoncés, notamment, par la Constitution ou par la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales, par la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme et la xénophobie, et par la loi du 23 mars 1995 tendant à réprimer la négation, la minimisation, la justification ou l’approbation du génocide commis par le régime national-socialiste allemand pendant la seconde guerre mondiale, ou tout autre forme de génocide ».
Cette disposition extrêmement large pourrait être brutalement résumée par l’interdiction pour les armuriers d’avoir le moindre contact avec des gens politiquement incorrects. Au regard du principe constitutionnel de la liberté de conviction, voilà bien, pour la première fois à ma connaissance, instaurée pour un commerçant, l’obligation d’être le censeur moral de ses clients.
L’article va encore plus loin puisqu’in fine, il dispose « il s’abstient de tout contact ou comportement susceptibles de le rendre sensible au chantage, et ne participe pas à des jeux de hasards dans des casinos ».
Voilà revenue la vieille interdiction de casino, telle qu’on la connaissait pour les Notaires et les Curateurs de faillite, notamment.
B. Le même 20 octobre 2008 était également publié au Moniteur belge, un arrêté royal adaptant à la loi sur les armes du 08 juin 2006, les modèles des différents formulaires et documents.
Cet arrêté royal technique comporte un ensemble d’annexes permettant maintenant aux Gouverneurs des Provinces, d’avoir les nouveaux documents propres aux conditions de la loi du 08 juin 2006, telles que modifiées par la loi du 25 juillet 2008.
Que l’on me permette de dire qu’il était temps, deux années s’étant écoulées depuis la nouvelle loi !
C. La journée du 20 octobre 2008 était propice à une troisième publication, soit un arrêté royal toujours du 16 octobre 2008 modifiant divers arrêtés d’exécution de la loi sur les armes. Cet arrêté royal est absolument et définitivement illisible !
On constatera que cet arrêté royal modifie les dispositions de l’arrêté royal du 20 septembre 1991, antérieur, faut-il le dire, à la loi du 08 juin 2006 et la loi du 25 juillet 2008, en ce que cet arrêté royal avait été modifié par l’arrêté royal du 29 décembre 2006. Or, on se souviendra que tant le législateur de 2006 que celui de 2008, ont exprimé leur volonté d’abroger les anciens textes.
Et bien, non ! Il faut encore connaître et appliquer les anciens arrêtés d’avant 2006, et combiner les notions incompatibles de la loi de 1933 avec celles de 2006 modifiées en 2008.
C’est donc l’arrêté royal du 20 septembre 1991 qu’il faut considérer, même si son article 1 est toiletté pour « coller » à la loi du 08 juin 2006. Or, cet arrêté royal de 1991 dispose en son article 3 que : « Sont également considérés comme armes de panoplie, les armes à feu qui ont été rendues inaptes au tir, selon les modalités définies à l’article premier de l’arrêté royal du 20 juin 1984… ».
Ainsi, par une seule disposition, toute l’ancienne législation se retrouve dans la nouvelle !
On notera que l’article 4 de l’arrêté royal du 16 octobre 2008 comporte l’expression de la lutte contre le blanchiment d’argent, notamment, puisque l’article 2 est modifié, en ce sens « le demandeur d’un agrément visé aux articles 5 et 21 de la loi justifie l’origine des moyens financiers utilisés pour exercer son activité au moyen de preuves écrites valables, telles que des documents bancaires et des contrats financiers ».
Cela suppose nécessairement que les autorités de contrôle puissent, dès à présent, avoir accès à toute information financière relative au demandeur d’agrément, selon les articles 5 et 21. On peut encore imaginer que ces informations pourraient être vérifiées près l’administration fiscale pour avoir toute leur pertinence.
Différentes dispositions qui n’ont plus lieu d’être sont maintenant abrogées, puisque remplacées par les nouvelles législations, mais l’on notera en l’article 13 que l’article 4 de l’arrêté royal du 20 septembre 1991 relatif aux armes à feu d’intérêt historique, folklorique ou décoratif, tel que modifié par l’arrêté royal du 29 décembre 2006, est maintenant complétée, en ce que la cession d’une arme visée aux articles 1, 4 et 6 emporte la procédure prévue à l’article 25 du même arrêté royal du 20 septembre 1991, soit la rédaction d’un modèle 9.
Il semble de facto que les armes de panoplie, telles que précisées ci-avant, sont maintenant soumises à un contrôle sous forme de la rédaction d’un modèle 9. Et on se souviendra alors du 3° alinéa du paragraphe 2 de l’article 28 de la nouvelle-nouvelle loi du 25 juillet 2008 qui dispose : « La saisie et la décision du gouverneur peuvent se rapporter également à des armes à feu en vente libre tirant des projectiles ».
Enfin, l’article 18 répond à l’exception prévue par l’article 12 de la loi du 25 juillet 2008 relatif au tireur occasionnel qui, lors d’une visite à un stand de tirs, détient une arme dans les conditions énumérées à l’article 16 d cet arrêté royal.
Ici encore, cet arrêté royal est entré en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge, soit le 20 octobre 2008.
Conclusions.
Comment tenter de s’y retrouver dans le méandre des législations successives paraissant parfois contradictoires ?
Comment assurer une réponse claire et précise à une question en la matière ?
Comment ne pas avoir le sentiment profond d’une insécurité juridique certaine, et éviter de commettre une erreur en la matière ?
Si d’aucuns, avant la loi du 08 juin 2006, pouvaient se vanter de faire le tour de la question et de connaître relativement bien la législation en matière d’armes, très honnêtement, au jour d’aujourd’hui, cela parait relativement impossible.
Le législateur du 08 juin 2006 a répondu dans l’urgence, et la rapidité à une situation politique par un texte mal ficelé, complexe et inapplicable. Il a tenté de récupérer la mayonnaise par le texte du 25 juillet 2008 en tenant compte pour partie d’une décision de la Cour Constitutionnelle.
Il eut été plus sage de remodeler intégralement le texte et de revenir à des catégories claires et objectives. La loi de 1991 était à cet égard un modèle du genre. Il suffisait de l’aménager. L’absence de méthode et la confrontation entre deux options politiques, l’une visant l’interdiction au total, l’autre visant une certaine tolérance réglementée en matière d’armes, ont fait que la loi au sens générique du terme est sincèrement illisible et incompréhensible.
Il faut espérer qu’à terme, un législateur courageux rédige en une vingtaine d’articles, un texte clair et précis qui permettra enfin aux citoyens normalement constitués de savoir clairement ce qu’il peut faire et ne pas faire, et dans quelles conditions.
L’avertissement des Anciens trouve ici toute sa force : « Summum ius, summa iniura ! »
Yves Demanet
Avocat